Ses produits ne sont peut-être pas «aussi cools» que ceux de son rival Apple, comme l'affirme la justice anglaise, mais Samsung Electronics creuse son avance sur le marché mondial des téléphones intelligents aux dépens du créateur de l'iPhone.

Passé devant Apple en 2011 pour le nombre de téléphones intelligents vendus, Samsung n'a cessé depuis de conforter sa place de numéro un. La firme à la pomme, dont l'iPad mini est sorti la semaine dernière dans 34 pays, est en revanche leader sur le marché des tablettes.

À couteaux tirés devant les tribunaux du monde entier, Samsung et Apple, qui s'accusent réciproquement de vol de brevets de technologie et de design avec des fortunes diverses, présentent des ADN foncièrement différents.

Créé à San Francisco il y a 35 ans par Steve Jobs et Steve Wozniak, Apple est perçu comme un laboratoire d'innovations à flux continu qui définit les modes et les tendances avec un nombre limité de produits, objets d'un culte quasi-religieux.

Samsung Electronics, rameau du conglomérat industriel éponyme, joue le rôle ingrat du suiveur inspiré qui valorise avec succès les idées de ses concurrents - au risque d'en répondre en justice.

Tout récemment, un juge britannique statuant sur un énième dossier de plagiat présumé, a pourtant débouté Apple, estimant que la tablette Galaxy de Samsung n'était pas assez «cool» pour être confondue avec l'iPad.

La tablette du sud-coréen «n'a pas la même simplicité raffinée et extrême qui est intrinsèque au design d'Apple. Elle n'est pas assez cool», avait alors estimé le magistrat.

Austère, et alors?

Selon le cabinet de recherche IDC, la part de marché mondiale de Samsung au troisième trimestre s'est établi à 31,3%, contre 15% à Apple. Et l'écart se creuse entre les deux industriels puisqu'il atteint 16,3 points alors qu'il n'était que de 15,7 points au trimestre précédent.

«L'étiquette de copieur colle toujours à la peau de Samsung, que ça lui plaise ou non (...) mais le fait de parvenir à suivre rapidement (les innovations concurrentes) peut mener au sommet, et Samsung est un cas d'école à cet égard», estime Kevin Restivo, analyste chez IDC.

Deux facteurs expliquent essentiellement la trajectoire du sud-coréen, selon lui: le choix du système d'exploitation Android de Google et son offre qui combine haut de gamme et grand public.

Google équipe désormais 75% des appareils vendus dans le monde, contre moins de 15% pour le logiciel iOS, qui équipe l'iPhone d'Apple, selon IDC.

En adoptant Android, Samsung a pu se concentrer sur les fonctions «dures» de ses téléphones et ringardiser les anciennes gloires de la téléphonie mobile, Nokia et Blackberry, souligne Kevin Restivo.

Autre coup gagnant: sa stratégie marketing. Samsung tient la dragée haute à Apple dans le haut de gamme avec la série des Galaxy S face à l'iPhone tout en mettant sur le marché des produits plus abordables qui se vendent comme des petits pains dans les pays émergents.

«À l'échelle mondiale, peu de consommateurs ont les moyens de s'offrir des iPhones, et Samsung s'adresse à un nombre beaucoup plus large d'entre eux qu'Apple, comme le montre sa part de marché», observe Greg Roh, analyste chez HMC Investment Security.

Apple est plus rentable que Samsung mais c'est le sud-coréen qui finira par lui tordre le bras et fixer les conditions du marché, estiment les analystes.

«Je pense qu'Apple sera bientôt obligé de sortir des articles de bas ou de milieu de gamme», avance ainsi James Song, spécialiste des technologies chez Daewoo Securities.

«Apple a une part de marché d'environ 20% et une marge de 40%, Samsung a une part de marché de 40% (tous téléphones portables confondus) et une marge de 20%. Lequel survivra? Sans hésiter ce dernier», assure-t-il.

Question de volumes: alors que les ventes de l'iPhone 5 semblent décevoir, Samsung affirme avoir déjà écoulé plus de 30 millions de son rival, le Galaxy S III, depuis sa sortie en mai.