Le Québec vieillit, on ne le sait que trop bien. Mais il est en bonne compagnie sur le chemin de la maison de retraite. La plupart des pays industrialisés sont également au bord d'une crise qui peut se résumer ainsi: il y a trop de vieux et pas assez de jeunes pour financer leurs retraites et les soins dont ils ont besoin.

Même la riche Allemagne, qui porte actuellement l'économie européenne à bout de bras, n'y échappe pas. Ce qui fait croire à Angelo Katsoras et Pierre Fournier, auteurs d'une analyse publiée par la Financière Banque Nationale, que les Allemands n'ont pas les moyens de financer encore longtemps des pays plus endettés qu'eux.

L'autre vedette de l'heure, la Chine, est elle aussi à risque.

Le vieillissement de la population n'est pas si dramatique, entend-on souvent, parce que les retraités des pays riches ont du temps et de l'argent pour consommer, et continuer de faire tourner la roue de l'économie.

C'est vrai, mais à condition qu'il y ait assez de jeunes ménages qui travaillent, consomment et paient des impôts pour financer les retraites et les soins de santé des plus vieux. Ce qui n'est pas le cas.

L'augmentation du poids des personnes âgées de 65 ans et plus dans les sociétés occidentales ne mène qu'à une seule situation: une explosion de la dette des États.

Dans le meilleur des cas, comme le Japon qui a la plus vieille société du monde, l'abondance de l'épargne intérieure permet pour le moment au gouvernement de continuer d'empiler les dettes. Dans le pire des cas, c'est déjà la faillite comme en Grèce et en Italie.

Entre les deux, il y a beaucoup de pays, dont le Canada, qui se dirigent lentement mais sûrement vers le précipice. Les États-Unis, avec leur taux de natalité qui se maintient au seuil de renouvellement de la population, et grâce au nombre élevé d'immigrants qu'ils attirent, s'en tireront probablement mieux.

Mais le précipice s'est encore rapproché pour les autres, en raison de la crise financière de 2008 et des taux d'intérêt très bas qui perdurent et mettent à mal les caisses de retraite tant publiques que privées. Les États ont à assumer le fardeau de plus en plus lourd des soins aux personnes âgées, plutôt que d'investir dans la recherche-développement ou l'éducation pour soutenir la croissance économique.

Le pire, c'est qu'il est peut-être déjà trop tard pour donner le coup de barre nécessaire et corriger le déséquilibre. Dans beaucoup de pays, les «vieux» ont non seulement un poids démographique de plus en plus important, ils ont aussi un poids électoral suffisant pour bloquer toute réforme qui diminuerait leurs acquis.

La population âgée de 65 ans et plus exerce son droit de vote dans une plus grande proportion que tous les autres groupes d'âge. Au Canada, par exemple, ce sont les gens de 65 à 74 ans qui votent en plus grand nombre.

La paralysie guette les gouvernements de tous les pays qui grisonnent, parce qu'aucun politicien ne peut se permettre de se mettre à dos le quart ou le tiers de ses électeurs.

C'est déjà ce qui se passe au Japon, où 23% de la population a actuellement passé le cap des 65 ans. Tous les chefs de gouvernement qui se sont succédé au cours des dernières années n'ont pas survécu plus d'un an, tant les réformes qu'ils ont essayé d'implanter sont impopulaires.

Le Canada sera peut-être dans la même impasse en 2050, quand 27% de sa population fera partie de ce qu'on appelle l'âge d'or.