La première économie du monde n'échappe pas au ralentissement de la croissance mondiale, entravée avant tout par la crise de la dette publique européenne et par l'essoufflement de quelques grands pays émergents.

C'est ce qui a notamment incité le Fonds monétaire international à diminuer, hier, d'un cran à 2,0% sa prévision du rythme d'expansion des États-Unis cette année et à 2,25% pour 2013.

Le FMI croit la chose possible, cependant, uniquement si le Congrès parvient à abattre le mur budgétaire («fiscal cliff», selon la métaphore utilisée par le président de la Réserve fédérale Ben S. Bernanke pour le sortir de ses stériles débats). La force de l'impact, s'il devait survenir le premier janvier, est susceptible de retrancher jusqu'à quatre points de pourcentage à la croissance. En pareil cas, les États-Unis rechuteraient en récession, tout comme l'ont fait la zone euro ou le Royaume-Uni. La croissance mondiale vacillerait en pareil cas.

Plus vite les élus parviendront à s'entendre sur la façon de lisser les compressions budgétaires et les hausses d'impôt sur une plus longue période, plus grande sera la résilience de l'économie.

«Les investisseurs ne savent pas combien ils seront taxés en 2013, soit dans moins de six mois, déplore Stéfane Marion, économiste en chef à la Banque Nationale. On revit la même stupidité que l'an dernier.»

Cette incertitude entraîne des reports d'investissements et d'embauches qui nourrissent le ralentissement présent.

L'autre embûche qui guette les États-Unis, c'est le débat prochain sur le relèvement du plafond de la dette. Il est fixé depuis un an à 16 400 milliards US, une bagatelle qui sera atteinte l'hiver prochain, selon le secrétaire au Trésor Timothy Geithner. S'il n'est pas relevé à temps, Washington sera paralysé en début d'année.

Malgré le dysfonctionnement du Congrès, la plupart des prévisionnistes tablent sur un accord in extremis qui permettra à tous de se concentrer sur l'activité économique.

À ce chapitre, l'économie américaine dispose d'atouts qui font envie dans la morosité actuelle. Les autorités monétaires (la Fed) sont très proactives, les entreprises ont un bilan sain pour la plupart et le marché de l'habitation semble avoir enfin touché le fond de sa dépression.

«L'économie américaine se dirige vers un lent retour à la moyenne dans tous ses segments, observe Vincent Delisle, stratège chez Scotia Capitaux. En plus, les États-Unis sont en train de se donner un avantage énergétique. Le prix du baril de pétrole est aux environs de 85$US, celui du gaz naturel diminue parce qu'ils augmentent leur production.»

Cela diminue les coûts de leurs entreprises tandis que celles des pays émergents sont obligées de consentir des augmentations de salaire. «Les États-Unis deviennent plus concurrentiels», résume François Bourdon, vice-président et chef adjoint des placements chez Fiera Capital.

Et leurs consommateurs un peu plus riches. Depuis le sommet d'avril le prix du gallon américain (3,7 litres) d'essence a baissé de 50 cents. C'est l'équivalent de 30 milliards libérés pour des dépenses discrétionnaires de consommation.

L'Opération Twist poursuivie par la Réserve fédérale porte fruit. En troquant des obligations du Trésor de courte échéance contre d'autres de plus long terme, la Fed est parvenue à infléchir les taux hypothécaires de 30 ans à 3,7%.

Du jamais vu.

«Ce faisant, le marché de l'habitation est en train de se rétablir tandis que la production d'automobiles est en forte croissance», signale Douglas Porter, économiste en chef délégué chez BMO Marchés des capitaux.

À moyen terme, si la classe politique retrouve sa boussole, les solides fondements de l'économie américaine l'assureront d'une expansion qui, sans avoir le tonus des cycles précédents, fera envie.

«Les États-Unis ont les meilleures universités au monde, rappelle Michel Doucet, vice-président, gestion de portefeuille chez Valeurs mobilières Desjardins. Ils sont déjà rendus à l'ère du quaternaire, celle des services ultraspécialisés et des technologies de pointe.»

On n'a qu'à se rappeler d'où sont venus le web, l'iPad, ces inventions qui redéfinissent notre monde, conclut-il.

Croissance au premier trimestre 1,90%

Croissance prévue en 2012 2,00%

Taux de chômage (mai) 8,30%

Déficit sur PIB en 2012 (prév.) 7,50%

Dette sur PIB fin 2012 100%

Dette prévue fin2012 ($) 16400 milliards

Sources : Bureau of Labour Statistics, FMI, CBO