Deux gestionnaires de portefeuille restent perplexes à l'égard de la politique de dividende de Genivar, une firme de génie-conseil québécoise qui a annoncé l'achat de l'anglaise WSP la semaine dernière avec l'aide de la Caisse de dépôt et de l'Office d'investissement du Régime de pensions du Canada.

Dans la présentation aux analystes expliquant la transaction avec WSP, la direction de Genivar parle d'un bénéfice ajusté de l'entité combinée au 31 décembre 2011 de 1,46$ par action, soit moins que le dividende par action de 1,50$. Depuis l'annonce de la transaction, le titre de Genivar a perdu 6,6%, de 25,05$ à 23,39$.

Le versement d'un dividende élevé oblige ce consolidateur à financer ses acquisitions par l'émission à répétition de nouvelles actions. De fait, le bénéfice par action de Genivar est en baisse depuis 2009, selon une analyse de la firme de gestion de portefeuille Medici.

«Ça fait plusieurs mois que nous disons que le dividende de Genivar est trop élevé», soutient Carl Simard, président de Medici. Dans les derniers mois, ce franc-tireur a annoncé à l'avance les réductions de dividende chez Yellow Media, Superior Plus et Colabor.

L'action a reculé de 32% depuis son sommet de 34,55$ atteint le 28 février 2011.

Pour l'exercice financier 2011, Genivar a versé près de 80% de ses profits sous forme de dividende à ses actionnaires. Un taux de plus de 50% est habituellement considéré comme élevé.

Le chef de la direction financière de Genivar, Alexandre L'Heureux, a dit que Genivar choisit l'équilibre entre verser un bon dividende et continuer à croître par acquisitions.

«Parce que Genivar fait beaucoup d'acquisitions, les fonds autogénérés libérés [free cashflows] par action constituent une bien meilleure mesure que le bénéfice par action», a-t-il souligné. Malheureusement, GNV ne rend pas cette donnée publique.

Genivar verse un dividende trimestriel de 37,50 cents par action pour un rendement du dividende de plus de 6%. Un dividende de cette taille est généralement versé par des entreprises qui ont la caractéristique d'évoluer dans des industries à maturité tout en produisant d'importants fonds en provenance de l'exploitation.

Genivar est aux antipodes de cette description. En 16 ans, la firme de génie a réalisé 76 acquisitions, a rappelé son PDG, Pierre Shoiry, au collègue Jean-Philippe Décarie samedi dernier.

«Ça n'a aucun sens qu'une entreprise de croissance verse une grosse partie de ses profits en dividendes. Pourquoi ne pas garder l'argent qui est généré par les activités pour bâtir un trésor de guerre pour financer de futures acquisitions?», se demande Philippe Le Blanc, président de Cote 100, qui a écrit sur le sujet dans son blogue sur les affaires.com.

L'achat de WSP se fait à un prix de 637 millions de dollars en tenant compte des engagements envers le régime de retraite. Genivar financera aux deux tiers par l'émission de 17,6 millions de nouvelles actions pour 422 millions.

Le nombre d'actions de Genivar en circulation doublerait presque pour atteindre 50,5 millions d'actions. Moins de deux ans auparavant, en janvier 2011, le nombre d'actions en circulation s'élevait à 18,1 millions.

Une réduction du dividende entraînerait à coup sûr une baisse du prix de l'action de Genivar à court terme, conviennent les deux gestionnaires de portefeuille, ce qui expliquerait, selon eux, la réticence du conseil d'administration à corriger le tir.

Simultanément à son acquisition, Genivar met en place un régime de réinvestissement de dividendes (RRD), ce qui va limiter les sorties d'argent liées au dividende à environ 1$ par action au lieu de 1,50$, estime M. L'Heureux. La Caisse et le Régime de pensions du Canada vont participer au RRD.