Pendant que les grandes compagnies pharmaceutiques de la planète délaissent le Québec les unes après les autres, l'entreprise Valeant (T.VRX), elle, débarque ici avec ses boîtes. La pharma ontarienne a annoncé hier qu'elle déménage son siège social à Laval et y installe un nouveau «centre d'excellence».

Cette annonce-surprise, qui agira comme un baume sur une industrie qui encaisse les coups durs depuis des mois, entraine des investissements de 20 millions de dollars et la création d'une cinquantaine d'emplois. Elle prend aussi la forme d'un symbole: en quittant l'Ontario pour s'établir à Laval, Valeant devient la première multinationale pharmaceutique à établir son siège social au Québec.

«C'est un signal très important pour le Québec», a lancé hier le premier ministre Jean Charest.

En établissant son siège social au Québec, Valeant dote la province d'une entreprise qui emploie 5000 personnes dans le monde et génère un chiffre d'affaires de 2,5 milliards.

Comme l'a dévoilé hier La Presse Affaires, le gouvernement Charest débloque 6 millions pour soutenir les projets de Valeant, dont une subvention de 3,5 millions et un prêt sans intérêt de 2,5 millions.

En plus du siège social, qui emploiera de 10 à 15 employés, Valeant veut aussi créer à Laval un centre d'excellence axé sur les «cosméceutiques», des cosmétiques à base d'ingrédients pharmaceutiques. Le centre sera installé dans les locaux de Laboratoire Dr Renaud, acquis par Valeant en 2009. Il permettra de consolider les 250 emplois de Valeant au Québec et d'en créer une quarantaine de nouveaux, dont une dizaine de postes de chercheurs.

Valeant possède aussi à Laval l'ancienne usine de Dermik, l'ex-division des produits de la peau de Sanofi. L'entreprise s'est engagée à maintenir un plancher d'au moins 300 emplois permanents à Laval.

À l'origine établie en Californie, Valeant avait fusionné avec l'ontarienne Biovail en 2010 dans le cadre d'une supertransaction de 3,2 milliards. La nouvelle entité avait établi son siège social dans celui de Biovail, à Mississauga, en Ontario.

Pourquoi exactement tout ramener à Laval aujourd'hui? Le grand patron de Valeant, J. Michael Pearson, a évoqué hier l'aide gouvernementale québécoise et les importantes activités de l'entreprise dans la ville pour justifier le déménagement.

En entrevue à La Presse Affaires, M. Pearson a aussi avoué que les récents licenciements dans l'industrie pharmaceutique au Québec y facilitent le recrutement de travailleurs de talent.

«Le meilleur moment pour arriver, c'est quand tout le monde part», a-t-il lancé.

Ce Canadien, qui a passé une partie de son enfance à Saint-Lambert, continuera cependant de travailler du New Jersey, où est établie la filiale américaine de Valeant. Il s'est toutefois défendu de créer un siège social fantôme à Laval.

«Nous créons des postes ici, nos réunions du conseil vont se tenir ici, les décisions vont se prendre ici», a-t-il martelé.

«Ça fait longtemps que je dis: un jour, on va avoir le siège international ici dans la région de Montréal. C'est un rêve un peu fou, mais, aujourd'hui, j'ai l'impression de le réaliser», a dit quant à lui le président de la division canadienne de Valeant, Thomas Schlader.

Michèle Savoie, directrice générale de Montréal Invivo, la grappe des sciences de la vie de la région de Montréal, convient que les quelques postes de chercheur annoncés hier ne viennent pas combler les licenciements récents annoncés notamment par Johnson&Johnson, Sanofi et AstraZeneca.

«On a l'impression que le vent tourne. Dans les dernières semaines, on a vu plus de bonnes nouvelles que de mauvaises» dit-elle toutefois, saluant notamment l'arrivée de nouveaux fonds de capital-risque en sciences de la vie.

Le titre de Valeant, qui est inscrit à la Bourse de New York et à celle de Toronto, a perdu 45 cents hier à Toronto pour clôturer à 53,91$.