Les économistes du Mouvement Desjardins se disent carrément inquiets de l'évolution des baromètres de l'économie québécoise depuis quelques mois.

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Une inquiétude qui les motive même à réviser à la baisse leurs prévisions de croissance pour cette année et l'an prochain, lit-on dans leur bulletin de mise à jour publié hier.

Les économistes de Desjardins s'attendent désormais à ce que le produit intérieur brut (PIB) réel de l'économie du Québec affiche une croissance limitée à 1,4% en 2012, comparativement à leur prévision antérieure de 1,7%.

Et pour l'an prochain, en 2013, les économistes de Desjardins prévoient une croissance du PIB réel ramenée à 1,9%. Leur prévision précédente était à hauteur de 2,3%.

L'important voisin économique du Québec, la province de l'Ontario, subit aussi une révision à la baisse de la croissance de son PIB de la part des économistes de Desjardins. Leur révision est toutefois un peu moins prononcée que celle concernant l'économie québécoise.

Ainsi, ils s'attendent désormais à une croissance de 1,7% du PIB de l'Ontario cette année, comparativement à 1,8% prévu antérieurement.

Pour l'an prochain, en 2013, les économistes de Desjardins entrevoient un taux de croissance du PIB de 2,1% en Ontario. Leur prévision précédente était de 2,3%.

À l'égard du Québec, la révision à la baisse de la croissance attendue du PIB par les économistes de Desjardins s'appuie sur un constat pour le moins terne.

«L'évolution de l'économie québécoise inquiète depuis quelques mois», écrivent l'économiste-chef, François Dupuis, et son adjoint, Yves St-Maurice.

«Non seulement les statistiques de l'emploi ont créé un émoi, mais la confiance des consommateurs poursuit aussi sa chute, les exportations ne parviennent pas à remonter la pente, les mises en chantier se sont écrasées en janvier.»

Après un tel constat, les prévisions de croissance économique moindres au Québec des économistes de Desjardins sont les plus faibles parmi celles de leurs homologues dans les banques.

Un rebond en vue

À la Banque Nationale, principale concurrente de Desjardins au Québec, l'économiste et stratège en chef Stéfane Marion s'en tient à une prévision de croissance de 1,5% cette année et de 2,1% l'an prochain.

«Il est vrai que certaines données économiques récentes pour le Québec étaient plutôt inquiétantes, notamment pour le marché de l'emploi. Mais avec ce qui se passe aux États-Unis, je m'attends à un rebond de certaines exportations du Québec. Elles pourraient être une meilleure contributrice à la croissance, qui serait alors mieux répartie dans l'économie que la consommation des dernières années», selon M. Marion.

À la Banque Laurentienne, l'économiste Sébastien Lavoie soulève aussi «la fatigue des ménages québécois» comme un facteur négatif qui influencera la croissance économique au Québec au cours des prochains trimestres.

Toutefois, il ne s'attend pas à réviser ses prévisions (1,5% pour 2012 et 2013) avant le prochain épisode de budgets fédéral et provinciaux, lesquels s'annoncent particulièrement ardus.

Les prochaines données sur l'emploi, attendues le 9 mars, seront aussi très suivies par les économistes des institutions financières. Surtout après les mauvais résultats rapportés au cours des trois derniers mois de l'année 2011, durant lesquels l'économie du Québec a perdu 61 000 emplois.

Au Mouvement Desjardins, les économistes François Dupuis et Yves St-Maurice estiment que le léger rebond de l'emploi observé en janvier 2012 était encore trop timide pour être significatif.

«Cette amélioration [regain de 9500 emplois] a permis d'amoindrir les inquiétudes sans réussir à les dissiper complètement. Le risque à la baisse demeure présent pour les consommateurs», lit-on dans leur bulletin publié hier.

À la Banque Nationale, l'économiste Stéfane Marion mise encore sur la création «de 60 000 à 80 000 emplois» au Québec cette année. Mais il avoue aussi un certain scepticisme après les «données inquiétantes des derniers mois».

«Elles ont surpris tout le monde tellement elles étaient mauvaises. C'est pourquoi les prochaines données du marché du travail seront très attendues. L'économie du Québec a un retard de création d'emplois à rattraper», selon M. Marion.

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PRÉVISIONS D'ÉCONOMISTES BANCAIRES POUR LE QUÉBEC

(variation du PIB réel en %)

SOCIÉTÉ 2011*/ 2012 /2013

Mouvement Desjardins 1,6% /1,4% /1,9%

Banque Scotia 1,8% /1,4%/ n.d.

Banque TD 2,1% /1,4%/ 2%

Banque Nationale 1,6% /1,5% /2,1%

Banque Laurentienne 1,7% /1,5% /1,5%

Banque de Montréal (BMO) 1,7%/ 1,6% /2,2%

Banque Royale (RBC) 1,4%/ 1,8%/ 1,9%

* Les données mesurées du PIB pour 2011 sont attendues à la mi-mars.