Votre jus d'orange du matin pourrait vous sembler plus amer d'ici quelques semaines. Au gel récent des plantations floridiennes s'est ajoutée cette semaine une menace d'embargo des États-Unis sur le jus brésilien. Des ingrédients qui ont propulsé la valeur du jus sur les marchés mondiaux en hausse de 28% en l'espace de trois semaines.

L'augmentation la plus notable est survenue mardi dernier, stimulée par un communiqué de la Food and Drug Administration (FDA) indiquant que des traces d'un fongicide, le carbendazime, avaient été découvertes dans des stocks de concentré de jus d'orange en provenance du Brésil.

Misant sur un arrêt des importations de concentré de jus d'orange, les spéculateurs ont fait grimper de 9,7%, à 2,12$ US/livre, la valeur des contrats à terme pour livraison en mars de concentré de jus d'orange.

Les prix se sont toutefois résorbés hier de 11,6%, à 1,88$ US/livre, à la suite de l'adoption d'une mesure pour réduire la spéculation adoptée par l'organisme qui gère les transactions sur les contrats à terme à New York, la IntercontinentalExchange.

La spéculation

Le tout, malgré la confirmation par la FDA de l'arrêt temporaire de toute importation américaine de jus d'orange.

«L'industrie de l'orange est exposée à beaucoup de spéculation», explique Sylvain Charlebois, professeur de politiques alimentaires à l'Université de Guelph.

Depuis la fin septembre, le prix du jus d'orange a gagné plus de 40% sur les marchés mondiaux. Selon Sylvain Charlebois, «il faudra voir» et attendre encore quelques mois pour savoir si ces hausses se répercuteront dans le portefeuille du consommateur.

«Le cours doit être en augmentation pendant plusieurs jours avant de voir une augmentation des prix au détail. Il faudra donc que l'augmentation soit présente sur plusieurs semaines avant qu'on voie une différence pour le consommateur», explique-t-il.

Stefano Bertolli, vice-président communications pour les Industries Lassonde, abonde dans le même sens.

«Lassonde établit ses prix de vente en fonction d'une prévision à long terme du coût de ses intrants. Une hausse subite du prix des concentrés comme celle des derniers jours n'aura d'effet que si elle se transforme en hausse à long terme», a-t-il écrit dans un courriel acheminé à La Presse Affaires.

La hausse potentielle du prix du jus d'orange s'ajouterait à celle que les Québécois observent déjà pour plusieurs aliments. Selon Statistique Canada, le coût du panier d'épicerie a grimpé de 4,8% au Canada, et de 5,2% au Québec au cours de la dernière année.

Le prix de la farine

Alors que les fruits frais et les légumes ont encaissé des hausses respectives de 6,7% et de 13,2%, le prix de la farine a monté en flèche de 17,3%, entraînant une augmentation de la valeur du pain de 11,9%.

Ces dernières hausses de prix ne sont pourtant pas liées à une augmentation du coût des commodités de base. Depuis son sommet annuel atteint en février 2011, le court du blé cédé 36% de sa valeur. La même observation est faite pour le sucre dont les prix ont chuté de 32% au cours de la même période.

Selon Sylvain Charlebois, la hausse des prix observée en 2011 est une répercussion des coûts élevés pour ces commodités à la fin de l'année 2010.

«Ça prend toujours 6 à 9 mois pour voir ces augmentations-là se refléter sur les prix au détail, explique-t-il.

«En alimentation, les décisions sont souvent basées sur les moyens que les consommateurs ont pour absorber les augmentations des prix. Si on craint que les consommateurs ne soient pas en mesure de le faire, on tente de maintenir les prix à des coûts raisonnables le plus longtemps possible», a-t-il précisé.

Il s'attend toutefois à ce que le consommateur connaisse un répit pour l'année 2012, avec une augmentation du panier d'épicerie d'au maximum 2%.