L'année débute sur les chapeaux de roue pour l'industrie de l'électronique mondiale, et surtout pour Intel et Microsoft. Tous deux traversant un passage à vide depuis quelques années, ils profiteront du Consumer Electronics Show, à Las Vegas, pour essayer de freiner l'érosion de leur énorme part du marché informatique. À ce niveau, 2012 est peut-être l'année de la dernière chance pour ces deux géants américains.    

Microsoft ne mettra en marché Windows 8 qu'au courant de l'été prochain, mais ça ne l'empêchera pas de laisser sa marque sur le CES. Non seulement Windows est-il au coeur de l'ensemble de la stratégie de Microsoft, c'est aussi un composant important pour une majorité de fabricants. Au CES, ils dévoileront de nouveaux ordinateurs prêts pour Windows 8, ainsi que des tablettes conçues exprès pour ce système, enfin compatible avec des processeurs d'appareils mobiles fabriqués par d'autres qu'Intel.

«Le spectre de Windows 8 planera sur le CES cette année, c'est certain, note Avi Greengart, directeur de recherche sur les produits grand public pour Current Analysis, à Washington. Les fabricants déçus des piètres ventes de leurs tablettes Android en 2011 voudront se reprendre cette année et plusieurs opteront pour Windows. Ça s'ajoutera à tous ces nouveaux PC également au programme du CES.»

Selon Gartner, il se vendra 103 millions de tablettes en 2012, comparativement à 370 millions d'ordinateurs personnels. C'est une proportion de 27%, mais par rapport à 2011, c'est surtout une croissance de 63%, contre un recul de 4,5% pour les PC.

Le défi est donc double pour Microsoft. Faire mentir les nombreux analystes qui craignent que l'éditeur ait raté le virage vers la mobilité, source d'une croissance explosive qui profite tant à Apple et Google, ses principaux rivaux, mais qui lui échappe encore.

Au même moment, il lui faudra relancer le marché des ordinateurs personnels en moussant l'intérêt envers des appareils plus performants, plus polyvalents et... plus coûteux. «C'est là que ça se complique: après 30 ans à voir le prix des PC baisser, les acheteurs se laisseront-ils séduire par des appareils puissants et stylisés, mais plus onéreux?» interroge M. Greengart.

Intel à la chasse aux mobiles

Une part de la faute revient à Intel. 2012 marque la fin d'un important cycle d'investissement dans une nouvelle génération de composants informatiques devant damer le pion aux produits plus abordables, mais moins performants, de ses principaux concurrents: Nvidia, Qualcomm, Samsung et Texas Instruments. Intel est toujours le joueur dominant des PC, mais ses rivaux menacent avec leurs appareils mobiles très polyvalents, tablettes numériques en tête.

Les processeurs de la gamme Ivy Bridge, attendus en avril, de même que la famille de produits mobiles Medfield qui suivront, seront mis en vedette par Intel et ses partenaires au CES. On verra notamment une première génération d'«ultrabooks», des ordinateurs portables ultralégers et très performants sensés détourner les acheteurs des tablettes, en reprenant la formule initialement mise de l'avant par Apple et son MacBook Air.

Du côté d'Apple, le MacBook Air représente aujourd'hui 20% des ventes de portables, sa popularité croissante permettant à Apple de maintenir un rythme de ventes trois fois supérieur à celui de ses plus proches concurrents.

Dans les prochains mois, Intel investira 400 millions de dollars dans la seule promotion des ultrabooks, espérant stimuler un succès comparable à celui d'Apple. Sera-t-il au rendez-vous? Des analystes en doutent. Le succès d'Apple vient en grande partie de sa façon de vendre ses produits, plus que des produits eux-mêmes, disent-ils.

La firme ISI Group en conclut que pour un succès comparable, les ultrabooks animés par Windows 8 devront être plus abordables. «Leur succès dépendra d'un prix plus près des 700$ que de 1000$, le prix du MacBook Air», écrit Brian Marshall, analyste d'ISI, dans une note aux investisseurs.

Si ça se concrétise, il voit Windows 8 se tailler une part de 54% de ce marché dès cette année, puis de 68% l'an prochain, pour 21,6 millions d'exemplaires vendus. Une belle croissance, mais dans un créneau très pointu, même s'il risque d'être un thème dominant du CES, voire de l'année à venir dans le secteur informatique.