Les arrivées en Bourse des société de l'internet créent une nouvelle génération de millionnaires dans la Silicon Valley. Les marchands ne s'en plaignent pas.

Personne ne peut dire avec certitude combien il y aura de nouveaux millionnaires dans la Silicon Valley au cours des prochains mois.

Deux choses sont certaines: ils seront nombreux. Et ils auront envie de dépenser.

Pandora, LinkedIn, Zillow, Groupon... Une nouvelle génération d'entreprises liées aux médias sociaux a fait son lancement en Bourse cette année, et les sociétés devraient être plus nombreuses encore l'année prochaine avec l'arrivée possible, et très attendue, de Facebook.

Les dirigeants de ces entreprises doivent attendre six mois avant de vendre des actions. Lorsque la date fatidique arrive, ils débloquent des millions de dollars... et sablent le champagne.

Pour Eric Fischer Colbrie, agent immobilier chez Intero Real Estate Services, à Mountain View, cela veut dire plus de clients et plus de ventes.

«Depuis quelques mois, le téléphone a recommencé à sonner, dit-il. On sent que les choses bougent à nouveau dans la vallée.»

À la fin-septembre, M. Fisher Colbrie a mis en vente une luxueuse demeure de 232 mètres carrés avec un immense terrain dans la ville de Los Altos. La maison était offerte à 1 675 000$ et a été vendue en octobre, pour 1 740 000$ après trois offres.

Pendant que les effets de la crise économique plombent l'immobilier ailleurs aux États-Unis, les prix grimpent dans la Silicon Valley: les maisons unifamiliales coûtent entre 750 000$ et 1,1 million, et les prix ont grimpé en moyenne de 75 000$ depuis 11 mois. Les maisons plus chères, entre 1,3 et 1,5 million, ont augmenté de 150 000$, dit M. Fisher Colbrie.

«Les prix montent, car très peu de maisons arrivent sur le marché. Quand les gens déménagent ici, généralement, ils ne s'en vont pas.»

L'agent estime que la demande vient du fait que les géants de la Silicon Valley embauchent et versent des salaires généreux, sans parler des stock options qui propulsent certains dirigeants d'entreprise dans la stratosphère.

«Facebook, Google, LinkedIn, Apple... Ces entreprises embauchent énormément. Elles sont dans une phase d'expansion.»

Nouvelle bulle techno?

Quarante-et-une entreprises technologiques ont fait leur entrée en Bourse cette année, selon le décompte du New York Times. En moyenne, les titres ont grimpé de 20% le premier jour. Or, la frénésie s'estompe: certains titres se vendent désormais sous leur prix d'introduction.

Pour les hauts dirigeants, toutefois, même une baisse des actions équivaut à une cagnotte importante.

LinkedIn, par exemple, a été offerte à 45$ l'action lors de son arrivée en Bourse, il y a un peu plus de six mois. L'action de l'entreprise est aujourd'hui à 73$, ce qui se traduit par une capitalisation boursière de 7,06 milliards.

En novembre, les dirigeants de LinkedIn ont pu vendre, pour la première fois, leurs actions. Et ils ne s'en sont pas privés: une vingtaine de dirigeants sont automatiquement devenus multimillionnaires. Le PDG, Jeff Weiner, a personnellement récolté 25 millions lors du premier jour de l'autorisation de la vente.

Chez Pandora, la radio internet qui a fait son arrivée en Bourse plus tôt cette année, les dirigeants arriveront bientôt au terne des six mois et pourront vendre des actions.

Le site Yelp, qui permet au public de faire la critique de commerces et de restaurants, compte lever 100 millions dans une offre publique, sans doute en 2012. La société de jeux Zynga doit elle aussi arriver en Bourse sous peu.

Bien sûr, l'émission d'actions que tout le monde attend est celle de Facebook. L'entreprise pourrait récolter 10 milliards lors de son entrée en Bourse, qui pourrait survenir en avril prochain.

Le nouveau boom dans la Silicon Valley commence à chasser les effets de la crise économique de 2008, et évoque même les années de la bulle techno, il y a 10 ans.

Depuis 13 ans, Caroline Kirchmar est responsable des ventes chez BMW Mottorad à Mountain View, une boutique de motos luxueuses située à quelques coins de rue du siège social de LinkedIn et de Google.

Elle se souvient de la frénésie du début des années 2000. «Les gens dépensaient de l'argent comme je n'ai jamais vu dans ma vie, dit-elle. C'est tout juste si ça ne leur sortait pas par les oreilles.»

La crise de 2008 a fait mal à la région, et son entreprise a dû mettre à pied plusieurs vendeurs. Depuis un an, elle remarque un retour de la confiance chez les clients.

«Nous n'avons pas réembauché, mais les ventes sont en hausse par rapport à l'an dernier. C'est un pas dans la bonne direction.»