Coup dur pour une quarantaine d'employés de Theratechnologies (T.TH) qui ont appris hier leur licenciement. La société pharmaceutique montréalaise met fin à une étude clinique de phase II pour son produit-vedette, l'Egrifta, et supprime 60% de son personnel.

Les temps sont maussades pour les biotechs et Theratechnologies n'échappe pas au lot. Après avoir obtenu l'aval de la Food and Drug Administration (FDA) pour la commercialisation aux États-Unis de l'Egrifta en novembre 2010, Theratechnologies a vu son action péricliter de 65%, passant d'un sommet annuel de 5,98$ à un bas de 2,09$.

La situation s'étend à l'ensemble du secteur des biotechs et s'explique, selon John-Michael Huss, président de Theratechnologies, par «une perception de risque autour de ces entreprises».

«Les biotechs qui ont lancé des produits en 2010 ou 2011 ont vu leur situation se détériorer sur les marchés et c'est ce qui nous a forcés à prendre cette décision», explique-t-il.

Pour accélérer l'atteinte de la rentabilité, la direction de Thera a choisi de rationaliser ses dépenses. En mettant fin à son étude de phase II, l'entreprise prévoit réduire ses frais d'exploitation de 10 millions de dollars pour l'exercice 2012. Un baume financier pour cette entreprise qui comptait au dernier trimestre sur des liquidités de 40 millions.

«Lorsque vous êtes en période de crise comme nous le sommes actuellement, le mieux, c'est de ne pas dépendre sur des sources de revenus externes, explique John-Michael Huss. Aujourd'hui, nous aurons assez d'argent pour survivre trois ans et nous serons rentables en 2013.»

Les 40 postes supprimés hier s'ajoutent aux 24 que l'entreprise avait éliminés en juin dernier. En l'espace d'un an, la biotech est passée d'environ 90 salariés à moins de 30. Une situation qui pourrait conduire au déménagement des installations de Theratechnologies. «On va regarder toutes les possibilités pour garder les coûts au minimum, incluant les coûts immobiliers», précise John-Michael Huss.

En annonçant ces 40 licenciements, Theratechnologies indique aussi qu'elle met un terme au programme clinique de phase II qui avait été lancé en février dernier.

L'étude, qui en était au stade de recrutement des patients, cherchait à savoir si l'Egrifta pouvait compenser la perte de masse musculaire chez des individus atteints de maladie obstructive chronique (MPOC).

Advenant un succès clinique, puis une réponse positive des autorités réglementaires, c'est un marché de 3 millions d'utilisateurs potentiels qui aurait ouvert ses portes au médicament de Theratechnologies.

L'entreprise montréalaise devra donc se limiter à la première indication pour laquelle la FDA avait autorisé la commercialisation d'Egrifta, soit le traitement de la lipodystrophie chez les individus atteints du VIH.

Après avoir enregistré ses premières ventes aux États-Unis en janvier, Theratechnologies tentera maintenant de distribuer son produit phare partout sur la planète.

En vertu d'ententes signées avec les pharmaceutiques Sanofi-Aventis et Ferrer, elle estime pouvoir distribuer l'Egrifta à partir de la fin 2012 en Amérique du Sud, puis au début de 2013 en Europe, en plus d'étendre ses ventes à l'Afrique et au Moyen-Orient.

Le brevet que détient Theratechnologies pour l'utilisation d'Egrifta dans le traitement de la lipodystrophie reliée au VIH prendra fin en 2023.

Pour remplacer ce traitement, l'équipe de John-Michael Huss a généré au cours de la dernière année plus de 200 peptides, de grosses molécules qui ont toutes le potentiel de remplacer un jour l'Egrifta.

Theratechnologies compte sur l'une d'elles pour développer son nouveau médicament. Cette fois-ci par contre, il sera administré autrement que par une seringue.

«Aujourd'hui, il y a des peptides qu'on peut administrer en patch ou par voie nasale ou orale, indique le président de Thera. Ces développements sont récents et n'étaient pas possibles il y a 15 ans.» Selon John-Michael Huss, la décision prise aujourd'hui permettra d'accélérer la mise en marché de ce nouveau produit. «On met le pied sur l'accélérateur pour le nouveau peptide, et on va essayer d'amener celui-là en avant beaucoup plus rapidement», précise-t-il.

À la clôture des marchés hier, l'action de Theratechnologies a grimpé de 7 cents, ou 3,1%, à 2,35$.