Une goutte de sang. C'est presque tout ce qu'il faudra aux médecins de demain pour prédire votre futur en centre hospitalier. Mais avant d'y arriver, une gamme de méthodes analytiques devra être développée. La biotech montréalaise Prognomix y travaille, pour qu'un jour les promesses de la médecine personnalisée deviennent réalité.

Prognomix est une entreprise fondée par le Dr Pavel Hamet, vétéran de la médecine au Québec. Avec les années, il s'est bâti une expérience qui l'amène aujourd'hui à privilégier le développement d'outils capables de prévenir les maladies. Un objectif qu'il entend remplir par l'entremise de Prognomix.

«Présentement en médecine, 90% des ressources sont consacrées aux dernières années de la vie. Ça n'a pas de sens. On investit une fortune sur un organisme largement endommagé. Éthiquement, il faut le faire, mais on gagnerait à investir beaucoup plus tôt pour qu'on puisse prévenir les maladies», explique-t-il.

Vous chercherez longtemps les sarraus blancs chez Prognomix. Les employés de la petite entreprise du Technopôle Angus dans l'arrondissement de Rosemont-La Petite-Patrie travaillent avant tout avec des données. Des millions de données.

«Chaque test apporte deux millions d'informations génétiques. En parallèle, nous comptons sur 250 informations cliniques comme l'âge, la tension artérielle ou l'apparition de problèmes secondaires. Ce sont toutes ces informations qu'il faut mettre en relation pour identifier quels marqueurs génétiques peuvent être associés à des maladies», explique le président de Prognomix.

L'équipe de mathématiciens et de bioinformaticiens du Dr Hamet analyse ces données pour identifier, chez des patients diabétiques, les marqueurs génétiques qui les prédisposent à développer des complications aux reins ou des problèmes cardiovasculaires.

«Dans les unités d'hémodialyse, la plupart des patients sont des diabétiques. Cette complication est coûteuse pour le système de santé. En prédisant quels sont les patients diabétiques susceptibles de développer un problème de reins, on peut intervenir plus tôt dans la maladie», indique-t-il.

Son entreprise met au point des outils qui répondent aux demandes de la médecine spécialisée, cet axe de la recherche biomédicale qui tente d'identifier quelles sont les sous-populations susceptibles de développer certaines maladies ou qui sont disposées à répondre à un traitement.

«La médecine est encore empirique. Dans un cas particulier par exemple, j'ai cinq classes de médicaments parmi lesquelles choisir, mais chaque classe fonctionne peut-être pour 50% des patients. Pour le moment, un médecin doit se baser sur son expérience lorsqu'il administre un tel médicament. Les outils de la médecine personnalisée permettront de prendre une décision plus appropriée.»

Si une partie des tests développés dans les installations de Prognomix permettra aux médecins d'établir un diagnostic plus éclairé pour leurs patients, l'autre profitera à des entreprises pharmaceutiques cherchant à mieux cerner quels patients sont à inclure dans leurs recherches cliniques.

La semaine dernière, Prognomix officialisait d'ailleurs une première entente avec l'entreprise française Servier.

Un médecin entreprenant

Prognomix est la seconde entreprise initiée par le Dr Hamet. Pour cet ancien directeur du centre de recherche du CHUM, les découvertes doivent impérativement conduire à un traitement ou un test clinique pour répondre aux besoins du patient.

«Il faut oser lancer des entreprises en biotechnologie avec du capital de risque parce qu'il n'y a pas assez d'argent dans le public pour amener une découverte à sa commercialisation», explique-t-il.

Le Dr Pavel Hamet en sait quelque chose, et pour cause. Son équipe de chercheurs a découvert puis isolé il y a quelques années une hormone devenue un marqueur important dans le diagnostic de l'insuffisance cardiaque.

«Tout le travail de découverte et de caractérisation a été fait au Canada, mais les seuls qui font de l'argent avec ça aujourd'hui sont des Américains et des Japonais, précise-t-il. On a amené le savoir, mais on n'a absolument aucun bénéfice parce que le test clinique a été développé ailleurs.»

En plus de ses activités de médecin, de chercheur et de président d'entreprise, le Dr Hamet prend le temps de faire des représentations auprès d'élus du Parlement pour qu'on établisse une loi qui encadre l'accès aux données relatives au génome des citoyens canadiens.

«Au Canada, on n'a aucune protection en ce qui concerne les tests génétiques. Des assureurs ou des employeurs pourraient être récalcitrants à faire affaire avec des gens prédisposés à une maladie. Aux États-Unis, une telle loi existe présentement, mais ici, rien n'empêche qu'on puisse faire de la discrimination basée sur le génome.»

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PROGNOMIX

Fondateur

Dr Pavel Hamet

Président

Dr Pavel Hamet

Investisseurs

Victoria Square Venture, Fonds BIOInnovation, BDC Venture Capital

Résumé en 140 caractères

Biotech qui conçoit des méthodes d'analyse de marqueurs génomiques pour la médecine personnalisée de patients atteints du diabète de type 2.

Objectif d'ici un an

«Obtenir la validation de la FDA pour nos deux premiers tests qui cherchent à déterminer la susceptibilité de patients diabétiques à développer des problèmes cardiovasculaires ou des complications du rein. »