L'économie a beau ralentir, la marche des prix s'accélère plutôt, et réduit d'autant le pouvoir d'achat des ménages dont le revenu disponible progresse plus lentement.

Le taux annuel d'inflation est passé de 3,1% à 3,2% d'août à septembre, a indiqué hier Statistique Canada. Au Québec, il se situe à 3,4%.

Si on exclut de l'indice des prix à la consommation (IPC) ses huit éléments les plus volatils, on observe que l'inflation de référence (IPCX) est passée de 1,9% à 2,2% au Canada, d'août à septembre.

C'est la première fois depuis février 2010 que l'IPCX est supérieur à la cible de 2% de la Banque du Canada. En septembre, il était même à son taux le plus élevé depuis décembre 2008.

Depuis trois mois, l'inflation s'accélère et les salaires ne sont pas en cause. En rythme annuel, l'IPCX a trotté à 3,8% de juillet à septembre.

Ceux qui parient sur une baisse prochaine du taux directeur de la Banque du Canada auront de quoi déchanter avec ces données.

Le taux cible de financement à un jour, fixé à 1% depuis septembre 2010, va plutôt être maintenu à ce niveau pendant plusieurs mois encore puisque la Banque est très préoccupée par les risques baissiers qui pèsent sur l'économie mondiale, à commencer par la crise de la dette publique européenne.

«La Banque a déjà indiqué qu'elle était prête à tolérer une inflation plus élevée un certain temps, compte tenu des risques extérieurs, rappelle Sheryl King, économiste chez Merrill Lynch (Canada). Nous pensons que l'inflation élevée des prochains mois va mettre à l'épreuve sa tolérance.»

La firme s'attend à ce que l'IPCX franchisse les 3% d'ici cet hiver.

L'affaiblissement du huard face aux monnaies asiatiques et la forte hausse de certains biens de base comme le coton se répercutent dans les prix à la consommation.

Ainsi, le prix des vêtements et des chaussures a bondi de 4,9% au cours du mois. Il est en hausse de 2,4% sur une base annuelle, soit la progression la plus forte en une douzaine d'années.

Comme à chaque septembre, l'agence fédérale introduit les variations des droits de scolarité. Ils bondissent de 4,2% par rapport à 2010, soit l'augmentation la plus forte en six ans.

Le prix des voitures a aussi augmenté de 1,9% au cours du mois, avec la fin des rabais consentis pour liquider les stocks des modèles 2011.

«Il sera de plus en plus difficile de justifier un taux directeur ultra faible de 1% avec un taux d'inflation de référence au-dessus de 2% et une inflation totale au-dessus de 3%», croit Douglas Porter, économiste en chef délégué chez BMO marchés des capitaux.

En septembre, le taux d'inflation avançait à plus de 3% pour une sixième fois en sept mois. On a observé une progression des prix dans toutes les composantes, sauf dans le logement à cause de la faiblesse des taux hypothécaires, et dans les boisons alcooliques.

Le prix des aliments a augmenté de 0,2% sur une base désaisonnalisée.

En un an, il a bondi de 4,3%. Les ménages doivent dépenser 6,1% de plus pour acheter de la viande et 7,2% de plus pour les produits de boulangerie.

Fait à signaler, à la différence du calcul de l'inflation de base aux États-Unis qui exclut tous les aliments et toutes formes d'énergie, l'IPCX de la Banque du Canada inclut la viande et les céréales de même que l'électricité. Cela explique qu'il progresse rapidement depuis quelques mois.

En revanche, il pourrait ralentir ce mois-ci, si on se fie aux variations de prix au cours d'octobre, par le passé. «Au cours des dernières années, la contribution des effets saisonniers à la variation mensuelle d'octobre de l'IPC total a été environ -0,3%», fait remarquer Benoit P. Durocher, économiste principal chez Desjardins.

La Banque du Canada fera connaître mercredi ses prévisions d'inflation pour les mois à venir. En juillet, elle avait prévu que le taux annualisé de l'IPCX soit de 2,0% pour l'automne, ce qui paraît aujourd'hui un peu faible.