Le marché du travail canadien avait encore du tonus le mois dernier, même si les entreprises n'ont pas embauché pour un deuxième mois d'affilée. Cela contraste quelque peu avec le secteur privé américain qui continue d'augmenter ses effectifs à petites doses alors qu'au Québec, la création d'emplois était encore bien timide comme c'est le cas depuis le début de l'année.

D'un océan à l'autre, on comptait 60 900 emplois de plus en septembre qu'en août, selon les données de l'Enquête sur la population active de Statistique Canada. Cela a plus que compensé le gonflement de 27 100 personnes dans les rangs de la population active. Voilà pourquoi le taux de chômage a diminué de deux crans à 7,1%. Il s'agit du taux le plus faible du présent cycle et une heureuse surprise en ces temps d'incertitudes.

Le secteur public s'est gonflé de 36 900 personnes, essentiellement des enseignants à contrat qui avaient été remerciés au printemps à la fin de l'année scolaire.

La catégorie des travailleurs autonomes a aussi enflé de 38 900 personnes. Cela illustre sans doute que les entreprises préfèrent s'offrir des services à la carte plutôt que d'embaucher. Le segment des services professionnels, scientifiques et techniques s'est d'ailleurs enrichi de 35 600 emplois.

En revanche, c'est d'autant que s'est amincie la cohorte des services financiers et immobiliers, reflets indéniables de la correction boursière et du ralentissement dans le bâtiment résidentiel.

Les entreprises ont au net supprimé 14 900 emplois. Depuis le début de la reprise, en juin 2009, c'est la première fois que le secteur privé supprime des emplois deux mois d'affilée. «La perte d'emplois dans le secteur privé n'est pas un signe haussier», prévient Krishen Rangasamy, économiste à la Banque Nationale.

Depuis un an cependant, leur taux d'embauche reste deux fois plus élevé que celui du secteur public qui est passé en mode d'austérité budgétaire.

Les coupes privées ont été concentrées dans la fabrication qui a effacé tous ses gains de l'année, dans le transport et l'entreposage. Bref, dans des segments liés aux exportations. «Avec ses emplois bien rémunérés, le secteur manufacturier est un important baromètre de l'économie canadienne, rappelle Jacques Marcil, économiste principal chez TD. L'emploi dans ce secteur est moins que brillant.»

En revanche, on comptait 17 100 personnes de plus en forêt, dans les mines et carrières et dans l'exploitation d'hydrocarbures.

Depuis le début de l'année, le Canada compte 254 300 emplois de plus qu'en décembre, tous à temps plein de surcroît.

Quel contraste avec la performance médiocre du Québec que reflète mal la baisse de trois dixièmes du taux de chômage à 7,3%. La société distincte a tout juste créé 2200 emplois en septembre, mais 12 900 personnes ont déserté les rangs de la population active. Qui plus est, ces emplois sont tous à temps partiel. Les détenteurs d'emplois à temps plein sont 21 200 de moins qu'en août.

Cette année, le Québec compte jusqu'ici 18 500 emplois de plus qu'en décembre, tous à temps partiel. Le nombre d'emplois à temps plein est même en baisse de 8100.

À l'échelle canadienne, le nombre impressionnant de nouveaux emplois camoufle une réalité préoccupante que suggère aussi l'augmentation des travailleurs autonomes. Le nombre d'heures travaillées a diminué de 0,3% d'août à septembre tandis que les hausses salariales annuelles s'élèvent à 1,5% seulement, soit deux fois moins que le taux d'inflation. C'est de mauvais augure pour la consommation à l'approche de la haute saison des détaillants.

Heureusement, les signes que l'économie américaine tient le coup se multiplient. Les entreprises embauchent.

En septembre, il s'est ajouté 103 000 emplois, tous dans le secteur privé. Même en excluant le retour au travail des 45 000 grévistes de Verizon, le score a agréablement surpris les observateurs. Des révisions du Bureau of Labour Statistics ont ajouté en outre 99 000 emplois en tout aux résultats de juillet et août. Cela de quoi rassurer ceux qui craignent une rechute en récession de la première économie du monde.

Le taux de chômage est malgré tout resté à 9,1%. Il est passé sous les 9% durant un seul mois depuis le début de la reprise. Les États-Unis ont récupéré seulement 1,9 des 8,75 millions d'emplois fauchés par la Grande Récession.

Le taux officiel américain se situe maintenant à deux points de pourcentage au-dessus du taux canadien. En utilisant la méthodologie américaine, le taux canadien de chômage serait même de 6,3% seulement.