En attendant son premier appel public à l'épargne, Groupon, le géant américain des aubaines quotidiennes en ligne, joue avec les allumettes de la finance. L'entreprise traîne un déficit opérationnel plus important que l'argent qu'elle a en poche, et les chances qu'elle se brûle les doigts ne sont pas si minces que ça.

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On arrive à ce déficit en mettant dans la même équation l'encaisse que la société a déclaré pour ses trois derniers trimestres, et l'argent qu'elle doit aux marchands de qui elle soutire des produits ou services à liquider. Autrement dit, il faut jouer un brin avec les chiffres, un jeu probablement rude avec les nerfs des promoteurs de Groupon.

Ainsi, comme l'ont calculé les fins analystes comptables du portail américain Business Insider, qui n'en sont pas à une lecture tortueuse de la réalité près, ce déficit opérationnel serait de 304 millions, en date de fermeture de son dernier trimestre, soit le 30 juin dernier.

Autrement dit, en déduisant quelques données financières simples, les comptables de Business Insider concluent que si Groupon avait fermé ses portes et avait été liquidée le 30 juin dernier, 304 millions de dollars de factures n'auraient pas pu être remboursés.

Par exemple, à cette date, l'entreprise de Chicago affirmait avoir 225 millions de dollars bien en poche, pour un actif total évalué à 376 millions de dollars. Ça ne comprend pas ses opérations courantes, qui génèrent un flux de trésorerie positif (Groupon a augmenté son flux de trésorerie de 25 millions au dernier trimestre).

Elle a donc les moyens de rembourser certaines factures. Mais pas toutes. Elle possède actuellement 680 millions de dollars en obligations diverses, incluant un passif de 392 millions de dollars, l'argent qu'elle doit aux marchands avec lesquels elle fait affaire. Elle se réserve 60 jours après la conclusion des enchères pour les payer, mais il faut quand même les payer.

Malgré la croissance phénoménale du créneau relativement naissant des aubaines quotidiennes en général et de Groupon en particulier, ce déficit opérationnel s'est accru au fil des neuf derniers mois. L'automne dernier, il s'établissait à 197 millions de dollars.

Comme cela fait neuf mois, on peut imaginer que l'entreprise est assez rompue à ce type de pratiques pour traverser le temps qu'il reste d'ici à son inscription en Bourse. À ce moment, on peut imaginer que les 304 premiers millions de dollars, au moins, iront à renflouer ce déficit.

Mais s'il fallait que la croissance de Groupon ralentisse, ce qui semble être le cas depuis le printemps, ou que les consommateurs cessent d'acheter à un rythme effréné, ce qui semble de plus en plus probable vu l'état de l'économie nord-américaine, il semble que Groupon pourrait traverser une période creuse.

En tout cas, ça démontre clairement comment l'arrivée massive de la concurrence, incarnée par des indépendants comme LivingSocial et de plus gros joueurs, comme Google, a grugé les marges de profit dans le marché des aubaines quotidiennes.