Après la décote, le choc boursier. De New York à Londres et Francfort, en passant par Toronto, les principales Bourses de la planète ont encaissé hier de lourdes pertes, dans la foulée de la baisse de la cote de crédit des États-Unis, vendredi dernier. Une glissade brutale, inédite depuis la crise de 2008, qui traduit le manque de confiance et l'extrême nervosité des investisseurs devant les politiques, tant américains qu'européens.

La crainte d'une nouvelle récession s'est emparée des marchés, hier, trois jours après que la cote de crédit du gouvernement américain eut été baissée pour la première fois de l'histoire. Malgré les mots rassurants du président Barack Obama, les Bourses du monde entier ont fondu, à commencer par celle de New York, qui a connu sa pire séance depuis la crise financière de 2008.

Hier, les investisseurs ont testé les marchés pour la première fois depuis que Standard&Poor's a baissé la cote de crédit de Washington de AAA à AA". De toute évidence, ils n'ont toujours pas digéré le jugement de l'agence de notation, qui avait toujours accordé la meilleure note au gouvernement américain depuis sa fondation, en 1941.

La Bourse de New York a perdu 5,55% de sa valeur, le pire recul en une journée depuis le mois de décembre 2008. À Toronto, le TSX a reculé de 4%. En Europe, les Bourses de Francfort (-5,02%), Paris (-4,68%) et Londres (-3,39%) ont fondu elles aussi, tout comme les parquets asiatiques et latino-américains.

On a cru que la crise de la dette américaine était passée, la semaine dernière, lorsque le Congrès a avalisé une entente entre démocrates et républicains pour permettre au gouvernement d'emprunter davantage. Mais les craintes persistent au terme du bras de fer politique qui a tenu le monde en haleine pendant une partie de l'été. La nervosité est d'autant plus grande que des pays européens comme la Grèce, le Portugal et l'Italie sont forcés d'adopter des mesures d'austérité pour équilibrer leurs finances.

«Il y a une composante qui est différente par rapport à la crise financière de 2008, souligne Stéfane Marion, économiste en chef à la Banque Nationale: c'est la méfiance devant la capacité des politiciens, tant aux États-Unis que dans la zone euro, de mettre en place des mesures budgétaires crédibles.»

Le président Obama a pourtant tenté de calmer les marchés, en après-midi.

«La bonne nouvelle, c'est que les problèmes économiques peuvent être résolus rapidement et que nous savons ce que nous devons faire pour les résoudre», a-t-il déclaré, appelant les élus à faire preuve de «bon sens et de compromis».

Les États-Unis, a-t-il martelé, méritent la note AAA, «quoi qu'en disent des agences de notation».

Une glissade annoncée

Les marchés avaient déjà entamé une glissade la semaine dernière après la publication d'indicateurs qui ont semé des doutes quant à la vigueur de la reprise économique américaine. Les observateurs craignent notamment que la Réserve fédérale - la Fed - soit incapable de faire face à une nouvelle récession, elle dont le taux directeur est déjà historiquement bas. Elle tentera d'insuffler un brin de confiance aux marchés aujourd'hui.

«On est au bord d'une récession en ce moment aux États-Unis, indique Jimmy Jean, économiste principal au Mouvement Desjardins. Il ne faudrait pas qu'il y ait un nouveau choc parce qu'on en sera là. Tous les indicateurs le montrent.»

Or, la débandade observée sur les marchés hier pourrait justement inciter les consommateurs à repousser certains achats, souligne Maurice Marchon, professeur en économie à HEC Montréal. Rien pour aider en période d'incertitude.

«Le fait que la Bourse baisse mine la confiance des consommateurs, souligne-t-il. Et ça augmente la probabilité qu'on ait effectivement une récession. C'est un cercle vicieux.»