Dopée par un «excellent» début d'année, la prestigieuse maison Hermès, au centre des appétits du géant mondial du luxe LVMH, prévoit désormais des ventes records en 2011, même si le renchérissement des cours des matières premières et des stocks bas devraient limiter sa croissance.

Le fabricant des célèbres carrés en soie a annoncé mardi une hausse plus forte qu'attendu de ses ventes (+22%) à 1,30 milliard d'euros au premier semestre, tirées par les États-Unis et la Chine où la croissance a dépassé les 30%.

«Les progressions sont exceptionnelles compte tenu des bases de comparaison déjà élevées», ont remarqué les analystes de Raymond James Euro Equities dans une note.

Symboles de cette santé «insolente», la France et l'Europe, un marché mature qui représente 37% de ses revenus, affichent une croissance de 20%. Et les ventes ont repris au Japon - 16% du chiffre d'affaires - secoué pourtant en mars par un séisme et une catastrophe nucléaire. La maison du 24 faubourg Saint-Honoré y a même ouvert une nouvelle succursale.

«C'est un très bon signe de la vitalité de notre modèle économique», a commenté auprès de l'AFP Patrick Thomas, le gérant du sellier. Fidélité au passé et créativité ou innovation, résume-t-il.

Sans aller jusqu'à prononcer la fin du «bling-bling», M. Thomas estime que la crise a poussé le client du luxe à rechercher la qualité et l'authenticité de l'objet. Selon une étude du cabinet Bain & Company, le marché mondial du luxe devrait croître de 8% en 2011, tiré par l'appétit de la Chine pour les grandes griffes.

A la Bourse de Paris, l'action Hermès prenait 0,35% à 221,45 euros dans un marché en hausse.

Fort de ses «excellents» résultats, la vénérable maison a relevé ses prévisions de croissance annuelle de ses revenus. Elle table désormais sur une hausse de ses ventes en 2011 dans une fourchette comprise entre 12 et 14%, contre 8 et 10% précédemment.

Concrètement, les ventes du groupe vont s'élever entre 2,4 et 2,75 milliards d'euros en 2011, soit mieux que le niveau historique des 2,4 milliards établi en 2010.

La rentabilité du fabricant du sac de voyage mythique pour dames «Kelly» devrait «être proche du niveau historique atteint en 2010», a-t-il fait savoir. La marge opérationnelle courante avait atteint un niveau record à 27,8% l'an dernier.

«Compte tenu de la croissance soutenue des ventes, en particulier dans les activités et les régions les plus rentables, nous pensons que cette +guidance+ (prévision) reste prudente», regrettent les analystes du courtier Aurel.

«Nous sommes prudents (parce qu') il peut y avoir une crise dans les économies émergentes», explique Patrick Thomas.

Il faut dire que le taux de croissance en 2011 devrait être inférieur à celui de 2010, en raison des capacités de fabrication du sellier qui sont limitées et de ses stocks qui sont bas actuellement, indique le groupe.

En outre, le prix des matières premières comme la soie, le cuir, l'argent ou encore l'or s'est fortement renchéri, poussé par une forte demande dans les pays émergents, dont les économies sont en plein boom. L'once d'or a dépassé lundi pour la première fois le seuil de 1.600 dollars.

«L'accumulation de tous ces facteurs va limiter la croissance dans la deuxième moitié de l'année», prévient Patrick Thomas, ajoutant que la guerre déclarée entre les héritiers du fondateur Thierry Hermès et le numéro un mondial du luxe LVMH (Vuitton, Givenchy, Moët&Chandon etc) «n'affecteront pas les affaires».

LVMH et Hermès s'affrontent depuis cet automne après que le premier a annoncé à la surprise générale être entré à hauteur de 17,1% dans le capital du second avant de porter sa participation à 20,21% fin décembre, contre 72% à la famille.

Les deux adversaires n'en ont pas fini d'en découdre, à commencer le 15 septembre à l'occasion d'une décision très attendue de la Cour d'appel de Paris sur la validité du rempart élaboré par la famille Hermès pour empêcher toute mainmise de LVMH.

La famille Hermès, qui a racheté pour 100 millions d'euros de ses actions (0,5% du capital) entre juin et début juillet sur les marchés pour les distribuer à ses employés, se dit «confiante».