Après le succès scientifique, Theratechnologies (T.TH) connaîtra-t-elle le succès commercial? La biotech montréalaise a en tout cas dévoilé des revenus modestes, hier, mais néanmoins jugés prometteurs par la plupart des analystes.

Theratechnologies a dévoilé à la fois les premiers résultats et les premières estimations permettant de juger de l'intérêt commercial de l'Egrifta, ce médicament qu'elle a réussi à faire approuver aux États-Unis l'an dernier. L'Egrifta s'attaque à la lipodystrophie, une condition qui creuse les joues et provoque une accumulation de gras à l'abdomen chez certains patients atteints du VIH.

Au premier trimestre de l'année, l'entreprise a touché des redevances de 194 000$ de son partenaire EMD Serono, qui écoule le produit aux États-Unis.

«C'est un chiffre modeste, évidemment, a convenu John-Michel Huss, président et chef de la direction de Theratechnologies. Mais ce sont les redevances qu'on a perçues pendant les premières quelques semaines. Ça va augmenter dans le futur.»

Le marché a réagi prudemment, l'action gagnant 2 cents pour clôturer à 4,54$. C'est encore loin de la moyenne des prévisions des analystes, qui voient le titre à 9,90$ dans un an.

D'autres chiffres permettent de mieux évaluer le départ d'Egrifta sur le marché. Selon la firme de recherche IMS, 383 patients prenaient de l'Egrifta à la fin de mars, un chiffre qui a bondi à 1315 le 24 juin. Theratechnologies estime qu'ils seront 4000 à l'utiliser à la fin de l'année, ce qui engrangera des ventes entre 25 et 35 millions de dollars pour son partenaire Serono. Theratechnologies touchera un pourcentage non dévoilé de ces ventes. Les analystes parient sur des redevances qui tournent entre 12 et 15% au départ, mais qui grimperont au fur et à mesure que le volume des ventes augmentera.

Ces estimations de vente sont très loin des attentes de l'analyste Pooya Hemami, de Desjardins, qui avait plutôt prévu des ventes de 72 millions. M. Hemami croyait que Serono parviendrait à rejoindre davantage de patients, mais, surtout, que ceux-ci utiliseraient davantage d'Egrifta. Les patients semblent «sauter» des doses plus que prévu, ce qui diminue les revenus par patient.

Malgré tout, M. Hemami reste optimiste. Le produit vient d'être lancé, rappelle-t-il, et il faudra du temps avant qu'il soit connu des patients, des médecins et des assureurs.

«Oui, les estimations de vente sont inférieures à nos attentes, mais ça ne nous préoccupe pas trop. Ce qui va vraiment compter, ce sont les ventes de 2012 et 2013. Il m'apparaît clair que Theratechnologies va finir par générer plus de revenus et devenir rentable», dit M. Hemami, qui croit que l'entreprise pourrait atteindre le point de rentabilité d'ici un an.

Philippa Flint, de Bloom Burton&Co., est moins convaincue. Seule analyste des six répertoriés par l'agence Bloomberg à suggérer de vendre l'action de Theratechnologies, Mme Flint a des doutes sur le potentiel de l'Egrifta de percer le marché américain.

«Nous recommandons aux investisseurs de rester sur les lignes de côté jusque plus tard dans l'année [...]», écrit-elle dans une note aux investisseurs.

Les partenaires de Theratechnologies ont déjà déposé des demandes pour commercialiser l'Egrifta en Europe, au Canada et en Israël, et l'Amérique du Sud est maintenant dans la ligne de mire.

Theratechnologies a annoncé des pertes de près de 12 millions pour les six premiers mois de l'année. Les revenus ont augmenté et les frais de recherche et développement ont diminué, mais l'entreprise a dû assumer des coûts exceptionnels pour s'inscrire à la Bourse américaine NASDAQ.