Depuis un an, Hervé Garcia lie jeunes artistes-peintres et entreprises. Avec Loulee Arts, il propose à celles-ci de prendre de la couleur en y installant des tableaux loués.

En entrant au Café Dépôt de l'avenue Curé-Labelle de Blainville, il n'y a pas que l'immensité des lieux qui retient l'attention. La dizaine de toiles de tous les formats exposées sur les murs également.

Elles sont signées Hervé Garcia qui, contrairement à de nombreux artistes, ne les a pas affichées gratuitement après entente verbale avec le commerçant, mais les a louées.

Sous peu, ce Café Dépôt pourrait transformer son décor. C'est que Hervé Garcia, à la tête de l'entreprise de location de tableaux Loulee Arts depuis un an, représente une quarantaine de jeunes artistes-peintres. Et chaque contrat de location, obligatoire d'un an, permet de changer de toiles tous les trois mois.

Depuis mai 2010, il courtise ainsi les entreprises de la région de Montréal pour garnir les murs de leurs locaux. L'aménagement d'une salle de conférence aux murs dénudés, de la réception d'un cabinet comptable ou de la salle à manger d'un restaurant peut être égayé au prix de 1,50$ par toile par jour. «C'est plus convivial dans une salle de réunion d'avoir un objet d'art», résume Hervé Garcia.

«Dans le cas de nos clients, ça rentre sous forme de loyer. Ceux-ci ont un catalogue et ils peuvent choisir leurs oeuvres. Ils peuvent même choisir leurs couleurs, leur type de toile. On peut aussi créer des toiles selon leurs goûts.»

Le président-éditeur de Loulee Arts s'appuie notamment sur l'intérêt toujours plus grand des Québécois pour l'art et le design d'intérieur pour assurer le succès de son entreprise. «Je suis persuadé que le timing est bon, mentionne-t-il. Personne ne fait ce que je fais. Et puis, les gens se raffinent. On le voit avec le vin, les machines expressos, la décoration intérieure.»

Il souligne du même souffle l'avantage pour les entreprises de posséder des oeuvres d'art. Sur le site internet de l'entreprise, il indique notamment que l'acquisition d'une oeuvre peut être amortie «à raison de 33,3% du prix total, par année, sur trois ans» au provincial, et «à raison de 20% par année» sur cinq ans au fédéral.

Si ses propres toiles, affichées sur le site internet de l'entreprise louleearts.com aux côtés de celles des autres artistes qu'il représente, sont mises à la disposition de la clientèle, c'est son entreprise que Hervé Garcia veut faire mousser aujourd'hui.

Vernissages

«J'ai créé le concept de A à Z, dit celui qui a importé du café dans une autre vie, en France. J'ai toujours travaillé à mon compte. Pendant 10 ans, j'ai implanté de petites machines à café dans 600 entreprises. J'ai eu jusqu'à 20 employés. J'aimerais faire la même chose avec Loulee Arts, un copier-coller. Mais pour l'instant, je peine à trouver du personnel. J'arrive à 40 ans. J'aimerais déléguer cette partie, ne faire que des toiles et organiser des événements.»

Car voilà une des avenues de rentabilité de Loulee Arts: des vernissages avec les artistes que Hervé Garcia représente.

Il y a d'abord la location des toiles. Et éventuellement la vente de celles-ci. «Le commerce fait alors 10% de commission, l'artiste 50% et moi 40%», explique Hervé Garcia. Il y a aussi l'affichage de publicités sur le site de Loulee Arts: 300$ pour une carte professionnelle et environ 3000$ pour une bannière, par an.

Quant aux vernissages, dans une galerie de Montréal, ils coûtent près de 6000$ à organiser et exigent deux semaines de préparation. «Mais je fais chaque fois le pari que je vais vendre des toiles, dit Hervé Garcia. Avec la clientèle, je génère de nouveaux contacts. Ces gens vont devenir des visiteurs de mon site.»

Et les artistes? Pour participer aux vernissages, ils doivent débourser 500$ à 600$, mais il ne leur en coûte rien pour exposer leurs toiles sur le site de Loulee Arts ni pour être exposés en entreprise. «Je les trouve sur l'internet, explique Hervé Garcia. Je les sollicite. Et je n'exige pas de représentation exclusive. Les artistes, uniquement des Québécois, sont libres de faire ce qu'ils veulent. Même les galeries d'art peuvent s'afficher et afficher leurs artistes.»

L'an prochain, Hervé Garcia aspire à un chiffre d'affaires de 300 000$. Parallèlement, il souhaite susciter un désir d'exclusivité chez les dirigeants d'entreprise. «On peut aller dans un HomeSense pour décorer, souligne-t-il, mais on se retrouve avec la même toile que le voisin...»

De la compétition

Loulee Arts n'est pas la seule entreprise au Québec à offrir des services de location de toiles aux entreprises.

Artothèque le fait depuis 16 ans. La fondation loue des oeuvres sur toile d'artistes de la relève autant que d'artistes renommés. Les prix de location par mois et par oeuvre, pour un an minimum, vont de 8,50$ à 70$. Chaque mois, un pourcentage est retourné à l'artiste. Dans le cas d'une vente, celui-ci récolte 60% du prix.

Depuis 1982, le Musée national des Beaux-Arts du Québec offre aussi un tel service par le biais de sa collection Prêt d'oeuvres d'art qui regroupe 1700 oeuvres de 770 artistes du Québec. Les frais de location vont de 200$ à 350$ par année, pour une durée minimale de deux ans, dépendamment des dimensions de l'oeuvre.

La Galerie d'art Stewart Hall de Pointe-Claire met en location plus d'une centaine d'oeuvres. Les toiles, photos et autres estampes sont louées de 6$ à 30$ par mois. La Bibliothèque Gabrielle-Roy à Québec offre aussi un tel service.

À ce titre, Hervé Garcia de Loulee Arts précise par courriel: «Nous sommes les seuls à proposer un site au Québec où vous pouvez trouver un répertoire de fournisseurs de services reliés à l'art et au design, un catalogue d'artistes, y acheter ou y louer des oeuvres ou encore organiser des semaines d'expositions ou d'y faire encadrer vos toiles. Bien évidemment, nous n'avons pas inventé chacune de ces activités, toutes existent déjà, mais aucune d'entre elles ne propose tous ces services comme nous le faisons sous une seule entité.»