Le ralentissement de l'économie américaine au premier trimestre a commencé à peser sur l'économie canadienne.

Après deux fortes augmentations de 0,5% d'affilée, la production réelle a reculé de 0,2% en février, a indiqué hier Statistique Canada. Il s'agissait du premier repli mensuel depuis septembre. Les prévisionnistes s'attendaient plutôt à du surplace.

La décroissance était concentrée dans les segments de l'économie liés au commerce extérieur. Ainsi, la fabrication a reculé de 1,6%, le commerce de gros de 1,0%, le transport et l'entreposage de 0,7%.

Il faut rappeler cependant que ces trois segments avaient connu un très fort mois de janvier. «Le repli de février peut être considéré comme un retour du balancier tel qu'on en observe régulièrement au sein des statistiques économiques», nuance Benoit P. Durocher, économiste principal chez Desjardins. Si on fait abstraction de la fabrication et du commerce de gros, le produit intérieur brut (PIB) réel a augmenté de 0,1%, estime-t-il.

Cette modeste croissance est concentrée dans les services. Le commerce de détail, les services financiers et administratifs de même que les industries culturelles et d'information ont tous progressé, mais les administrations publiques et les services de santé ont reculé quelque peu. Cela pourrait signifier que l'austérité budgétaire commence à laisser son empreinte dans l'économie.

Sous une autre lorgnette, on constate que le recul dans le secteur des biens est quasi généralisé.

Seul le secteur du bâtiment et des travaux publics enregistre un mince gain de 0,1%, attribuable aux bâtiments non résidentiels et à des travaux de génie et de voirie. La construction résidentielle a fait du surplace, ce qui n'est guère encourageant. «Avec l'entrée en vigueur des nouvelles règles hypothécaires en mars jumelée à d'autres facteurs tels que l'endettement élevé des ménages et la hausse graduelle des taux d'intérêt à venir, l'activité dans ce secteur devrait, sans surprise, continuer à se replier», présume Marie-Claude Guillotte, économiste chez Valeurs mobilières Banque Laurentienne.

Ce mois-ci, l'extraction minière et d'hydrocarbures est restée stable. Les stocks de pétrole aux États-Unis ont atteint des sommets en mars, ce qui n'est pas de nature à stimuler la production canadienne.

La baisse d'activité dans la fabrication était généralisée puisque 16 des 21 sous-secteurs ont reculé. «Le repli de cette industrie n'est pas surprenant étant donné la croissance insoutenable qu'elle a enregistrée pendant les deux mois précédents», précisent Matthieu Arseneau et Marco Lettieri, économistes à la Banque Nationale.

Il y a là peut-être aussi le signe que la force excessive du huard fait perdre des parts du marché américain aux exportateurs canadiens. Il a poursuivi son ascension en mars et en avril.

On notera surtout la chute de 7,5% de la production de véhicules et de pièces. En janvier, ce sous-secteur avait fortement rebondi après avoir été en partie paralysé en novembre et décembre pour des fins de réoutillage. Un ajustement à la hausse est plausible en mars, mais l'industrie automobile connaît un printemps difficile en raison du tsunami au Japon qui a perturbé les chaînes d'approvisionnement de plusieurs usines.

Cela dit, le Canada paraît néanmoins bien placé pour avoir mieux fait que les États-Unis, dont l'économie a avancé de 1,8% seulement, en rythme annuel, de janvier à mars. Après deux mois, l'acquis de croissance atteint 3,8%, en présumant une stagnation en mars.

Cela reste toutefois en deçà des 4,2% escomptés par la Banque du Canada il y a encore moins d'un mois. Les autorités monétaires canadiennes tablent aussi sur un ralentissement de la croissance à 2,0% durant le printemps qui tient compte des effets de la tragédie japonaise. Par la suite, le rythme d'expansion sera contenu aux environs de 2,5% tout au plus. Er cela suppose que l'économie américaine retrouve un certain tonus.