Ce n'est pas encore la catastrophe, mais la Banque TD espère faire clignoter un «feu jaune» avec son nouvel indice mesurant la vulnérabilité financière des ménages canadiens.

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Selon la banque torontoise, les citoyens de la Colombie-Britannique sont - et de loin - les plus susceptibles de pâtir d'un changement à leur situation économique, comme la perte d'un emploi ou une hausse imprévue des taux d'emprunt. Suivent ceux de l'Alberta et de l'Ontario, tandis que le Québec se situe en milieu de peloton, indique un rapport publié hier.

«La vulnérabilité a augmenté. Elle n'est pas trop critique ni préoccupante, mais, en terme d'analogie, on utiliserait le feu jaune», a dit Pascal Gauthier, économiste principal chez TD, en entrevue à La Presse Affaires.

La vulnérabilité aux chocs économiques a particulièrement grimpé au cours des deux dernières années et touche maintenant toutes les provinces, alors que certaines étaient auparavant considérées à l'abri.

La TD souligne que son indice ne constitue pas une «prédiction de l'avenir», mais vise plutôt à sensibiliser les Canadiens aux dangers de l'endettement.

Pour calculer l'indice, la banque a étudié six sous-composantes, dont le ratio dette-revenu disponible, le ratio du prix des maisons par rapport au salaire moyen et le taux d'épargne personnel. Chaque élément a ensuite été pondéré afin d'arriver à un résultat le plus fidèle possible à la réalité.

Certaines conclusions sont étonnantes. Par exemple, on apprend que les Canadiens épargnent en moyenne 3,9% de leur revenu disponible, une proportion qui grimpe à 4,2% au Québec et à 15% en Alberta. Mais, en Colombie-Britannique, ce taux tombe dans le négatif de 4,2%, ce qui signifie que le ménage moyen doit emprunter pour payer l'ensemble de ses dépenses courantes.

L'Alberta, de son côté, est la province dont le degré de vulnérabilité s'est le plus accentué depuis 2007. Cela s'observe dans le taux de délinquance de plus de 90 jours des prêts hypothécaires, qui est le plus élevé de toutes les provinces canadiennes et dont la croissance a été la plus rapide.

Le Québec fait bonne figure

Les Maritimes, tout comme le Québec, sont considérées «modérément vulnérables» par la TD. Le ratio de la dette totale par rapport au revenu disponible a grimpé assez vite depuis 2007 - il atteint 99,5% au Québec, comparativement à 127% pour l'ensemble du Canada -, mais pas assez pour grever de façon inquiétante la capacité de payer des ménages.

«Pour le Québec, compte tenu de la performance économique, de la bonne reprise et d'une situation de l'emploi qui est meilleure qu'ailleurs au pays, c'est un peu moins préoccupant en termes relatifs», a souligné Pascal Gauthier.

La hausse très marquée du prix des maisons dans la province, et particulièrement à Montréal, pourrait toutefois accentuer la vulnérabilité des ménages si le marché immobilier devait subir une baisse. Le ratio entre le prix moyen des propriétés et le salaire moyen - qui atteint 5,2 au Québec, nettement plus que la tendance historique - soulève aussi des problèmes potentiels pour certains ménages.

Le désarroi financier grandissant de plusieurs familles québécoises est bien palpable sur le terrain. Chez Option consommateurs, qui prodigue des conseils financiers gratuits, la composition de la clientèle a changé radicalement depuis deux ans, souligne Caroline Arel, avocate et responsable du service budgétaire.

«Traditionnellement, on rencontrait beaucoup plus des familles à faibles revenus, tandis que, maintenant, il n'est pas rare de rencontrer des ménages avec des revenus familiaux de 100 000$, qui ont une hypothèque, des marges de crédit, des cartes de crédit, des prêts étudiants...» a expliqué Mme Arel.

De toutes les provinces canadiennes, seul le Manitoba est considéré par la TD comme «relativement peu vulnérable». Les ménages y accumulent en moyenne moins de dettes qu'ailleurs, et la différence entre le prix des maisons et le salaire moyen est beaucoup plus faible que dans l'ensemble du pays.

La TD soutient qu'aucune province ne semble sur le point de subir une crise financière. Selon la banque, la table est mise pour une ère de modération dans l'accumulation de dettes par les ménages, grâce entre autres aux mesures plus restrictives d'octroi des prêts hypothécaires imposées par Ottawa.

La montée très graduelle des taux d'intérêt prévue au cours des prochains trimestres ne laisse par ailleurs pas entrevoir de choc trop brutal pour la plupart des ménages, avance la TD.