Au cours de la dernière année, le secteur des ressources naturelles a connu des hauts et des bas boursiers et, surtout, il a vu un miracle humain se produire. En effet, qui ne se souvient pas du sauvetage spectaculaire des 33 mineurs chiliens? Compte tenu des millions de témoins heureux du dénouement, ce sauvetage en direct constitue une mine d'or pour la réputation du Chili!

Toutefois, aucun miracle ne s'est produit dans deux dossiers d'exploration et d'exploitation de nos ressources naturelles au Québec en 2010, celui du gaz de schiste et celui, plus récent, de la relance de la mine d'amiante Jeffrey. En effet, dans un cas comme dans l'autre, ces projets ont provoqué des levées de boucliers et les médias ont suivi ces dossiers de près. D'une part, on y a rapporté des assemblées houleuses de citoyens préoccupés par une exploitation qualifiée d'improvisée; d'autre part, des lobbyistes étrangers sont venus faire la leçon et demander au gouvernement du Québec de ne pas exporter un produit qu'ils jugent dangereux. L'automne 2010 a été une mine de difficultés pour plus d'un intervenant...

Je retiens, donc tu es

Ce qui est retenu des médias, traditionnels ou autres, par les auditeurs, les téléspectateurs ou les lecteurs, contribue à la formation des images des différents intervenants qui gravitent dans un secteur économique et, surtout, des industriels personnifiés par les hommes et femmes d'affaires qui donnent des ordres économiques: ces images, formées de plusieurs agrégats, qui positifs, qui négatifs, sont à la base des réputations avec lesquelles les entreprises évoluent en société.

Ainsi, que pensent les Québécois du secteur du gaz de schiste? Quel en est le reflet sur la réputation des sociétés engagées dans son exploitation? Également, quelle réputation le gouvernement du Québec est-il en train de se forger, ici comme à l'étranger, en étant associé à un projet minier controversé? En somme, quelle est la réputation des industries minière et gazière au Québec?

»Difficile à faire, facile à défaire!»

Tel est le fameux dicton que toute entreprise ou organisation doit considérer. Construire et surtout protéger une réputation en cette ère de médias et réseaux sociaux - blogues, gazouillis (tweets) et pétitions en ligne - n'est pas une sinécure. Alors, comment doit réagir un gouvernement, un secteur industriel, une entreprise ou encore un organisme de charité lorsque sa réputation est attaquée par un employé, un client, un ex-bienfaiteur ou un regroupement de personnes?

La première réaction pourrait être d'en faire fi ou d'en minimiser les conséquences et prétendre que l'intervention médiatisée de l'adversaire n'est pas justifiée. Cependant, le déni n'est pas une option acceptable dans un monde où la perception fait loi. Afin de mieux réagir, Leslie Gaines-Ross, Chief Reputation Strategist, propose six tactiques comme moyens d'autodéfense pour toute organisation dont la réputation est malmenée:

- Ne pas utiliser une force de réaction disproportionnée. Être un gentil Goliath, pourquoi pas. À méditer: adopter une défense raisonnable, juste, humaine.

- Répondre rapidement et avec agilité. À l'instar des athlètes, l'entraînement est de mise. Les gestionnaires doivent donc s'entraîner et être prêts à défendre habilement la réputation de l'organisation.

- Mettre les employés dans le coup. Un employé ou un bénévole loyal mis à contribution vaut mille messages publicitaires en matière de réputation.

- Être coquin. Attaqué sur YouTube? Pourquoi ne pas répondre par la bouche des canons des adversaires? Cette tactique a été expérimentée avec succès à maintes occasions.

- Recruter et déployer. Les personnes qui jugent favorablement l'organisation voudront rendre publiques leurs opinions favorables; alors, il faut les aider à aider l'organisation.

- Rappeler ses lettres de noblesse. Toute organisation qui a bien cultivé le terrain social sur lequel elle évolue aura récolté quelques éloges; c'est le moment opportun de le rappeler à qui de droit.

Pensez avant d'agir

La réputation d'un secteur d'affaires, comme celle des entreprises qui y sont actives, peut souffrir indûment d'attaques lancées par différents objecteurs; si c'est le cas, l'autodéfense a sa place et les tactiques proposées ici sont fort valables. Cependant, si l'attaque contre la réputation est justifiée, aucune de ces tactiques ne résistera à terme; c'est plutôt le moment de faire un examen de conscience d'affaires.

Il est de mise d'éprouver un sentiment de gratitude à l'endroit des compatriotes qui font vivre les secteurs d'affaires miniers et gaziers et qui vivent des différents métiers qui y sont rattachés, d'autant plus que l'apport économique de ces secteurs pèse lourd dans le produit intérieur brut au Québec. Cependant, il est aussi de mise de leur rappeler que c'est à force de bien explorer et de bien exploiter que la bonne réputation de leurs secteurs et de leurs entreprises fait surface!

Normand Turgeon, Ph. D., est professeur titulaire de marketing à HEC Montréal.

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