L'un des membres les plus en vue de la famille Bronfman a été condamné vendredi en France pour délit d'initié à l'issue d'un procès ciblant plusieurs anciens dirigeants du groupe de communication et de divertissement Vivendi Universal.

Edgar Bronfman Jr, qui dirige aujourd'hui Warner Music, a écopé d'une peine de prison de quinze mois avec sursis et d'une amende de cinq millions d'euros, soit près de sept millions de dollars, dans une décision rendue par le tribunal correctionnel de Paris.

L'ancien PDG de Vivendi Universal, Jean-Marie Messier, longtemps considéré comme l'un des plus flamboyants entrepreneurs hexagonaux, s'est vu imposer une peine de prison de trois ans avec sursis et une amende de 150 000 euros.

Deux autres anciens cadres de l'entreprise ont été condamnés dans cette l'affaire, qui porte sur les agissements des gestionnaires de l'entreprise au début des années 2000.

Vivendi a absorbé à cette époque la division de divertissement de Seagram avant de se lancer dans une vague d'acquisitions qui avaient généré des dettes de plusieurs dizaines de milliards de dollars.

Edgar Bronfman Jr a brièvement dirigé l'entreprise résultante avant de devenir vice-président du conseil d'administration en 2001. Les transactions boursières litigieuses sont survenues l'année suivante.

Dans un communiqué diffusé sur le site de Warner Music, l'homme d'affaires de 55 ans a souligné qu'il était «déçu» que la cour n'ait pas suivi les recommandations du parquet, favorable à la relaxe des accusés.

«Je ferai appel de la décision rendue aujourd'hui devant la Cour d'appel de Paris et continuerai de me défendre énergiquement contre cette accusation. Comme je l'ai toujours maintenu, mes transactions étaient appropriées», a-t-il assuré.

Warner Music a fait savoir, dans le même communiqué, qu'elle était surprise de la condamnation et soutenait «pleinement» son directeur général pour la suite des procédures.

Edgar Bronfman Jr. est le fils d'Edgar Miles Bronfman et le petit-fils de Samuel Bronfman, qui ont fait fortune grâce à Seagram, longtemps spécialisée dans la vente de vins et spiritueux. C'est sous la direction de leur héritier, arrivé à la tête de l'entreprise au milieu des années 90, qu'elle développe ses activités dans le secteur du divertissement et, éventuellement, se fond dans Vivendi, vendant sa division de boissons.

Jean-Marie Messier, forcé de démissionner de la direction de Vivendi Universal en 2002, a été trouvé coupable hier «d'abus de biens sociaux» pour s'être fait attribuer, au moment de son départ, un «parachute doré» de 20 millions d'euros auquel il avait finalement renoncé.

Il a aussi été condamné pour «diffusion d'informations trompeuses» relativement à la situation financière de Vivendi Universal dans des communiqués produits à cette époque.

Selon le tribunal parisien, l'ancien PDG s'est comporté comme un «prestidigitateur de dette» devant les actionnaires en procédant à une présentation «tronquée et fallacieuse» des faits qui était susceptible de les induire en erreur.

L'homme d'affaires a indiqué hier que le verdict lui semblait «incompréhensible» et incompatible avec la décision rendue par un tribunal new-yorkais au début de 2010 dans une affaire connexe.

Un jury américain a alors condamné Vivendi pour avoir véhiculé des informations trompeuses aux actionnaires tout en exonérant ses dirigeants de toute responsabilité. La décision, qui risque de mener à des demandes d'indemnisations extrêmement coûteuses, a été portée en appel.

M. Messier dit vouloir «défendre son honneur» et «rétablir la vérité pour tout ceux qui ont accompagné Vivendi Universal au cours de ces années».

L'Association des petits porteurs actifs (APPAC), qui représente plusieurs petits actionnaires réclamant compensation pour les pertes subies au début des années 2000, a souligné que la décision du tribunal parisien représentait une «grande victoire».

«La justice comprend désormais très bien tout ce qui se passe dans les sociétés en terme de délits d'initié et de parachutes dorés. C'est un message fort aux chefs d'entreprise», a déclaré le président de l'association, Didier Cornardeau.