Non, ce n'est pas qu'une mode éphémère: les financiers et les entreprises du monde entier ont bel et bien pris le virage vert.

Les investissements en technologies propres ont progressé cette année. Et selon les analystes, la lancée devrait se poursuivre en 2011.

Ceux qui s'inquiètent de voir une bulle dans ce que les Anglais appelle la «clean tech» devraient se concocter une tisane et prendre quelques grandes respirations, croit Dallas Kachan, un ancien de l'influente firme Cleantech Group qui dirige maintenant Kachan&Co.

«Nous croyons que les investisseurs continueront d'être à la chasse aux occasions en 2011. Ils investiront des sommes robustes tirées à même les fonds qui se sont renfloués à des niveaux records partout sur la planète», écrit M. Kachan dans un rapport publié récemment.

Il est vrai que le troisième trimestre 2010 a été décevant dans le monde des technos vertes. Les investissements mondiaux ont totalisé 1,6 milliard US, une baisse de 25% par rapport au même trimestre en 2008.

Sauf que les deux trimestres précédents avaient été très vigoureux. Conséquence: même sans les chiffres du quatrième trimestre, qui ne sont pas encore compilés, l'année 2010 totalise des investissements de 5,8 milliards, déjà plus que les 5,7 milliards recueillis pendant toute l'année 2009.

En fait, le Cleantech Group prédit qu'on terminera l'année avec des investissements de 7,3 millions US, ce qui en ferait la deuxième année la plus importante après 2008, qui avait permis de récolter 8,5 milliards US.

La rareté des ressources, le besoin d'augmenter l'efficacité des processus industriels et le désir d'indépendance énergétique continueront de pousser les investissements dans les technologies propres, croit Dallas Kachan.

La Chine et encore la Chine

L'efficacité énergétique émergera comme la «rock star» du secteur en 2011, prédit l'analyste, qui signale que la Russie a dévoilé le mois dernier un vaste plan d'efficacité énergétique - le pays de Dmitri Medvedev gaspillerait autant d'énergie que celle consommée par toute la France.

Une remontée des prix de l'essence pourrait signer le grand retour des biocarburants l'an prochain. Et des innovations du côté nucléaire sont attendues après des années de relative inactivité.

Quant à savoir où ça se passera sur la planète, la réponse est simple: c'est la Chine, la Chine et encore la Chine qui s'impose comme la grande puissance mondiale des technologies propres.

«Le soutien du gouvernement central envers les entreprises chinoises de technologies propres inscrites sur les Bourses chinoises continuera de donner aux entreprises d'énergie solaire, éolienne et autres des avantages d'accès au capital et de croissance, ce qui leur permettra de conquérir le monde», dit M. Kachan.

Le Canada et le Québec, pendant ce temps, continuent d'accuser un retard dans le secteur, comme l'ont martelé cette année plusieurs études.

Un fonds d'amorçage destiné à soutenir les entreprises en démarrage du secteur devrait toutefois voir le jour au Québec l'an prochain. Le milieu s'attend aussi à ce que Teralys, un fonds de fonds de 700 millions, commence à investir dans des fonds de capital-risque consacrés au secteur, qui financeront à leur tour des entreprises.

En mars dernier, la Bourse de Toronto a créé un indice des technologies propres, qui regroupe aujourd'hui 128 entreprises, dont 51 sont inscrites à la Bourse croissance. Leur capitalisation boursière totalise 17,2 milliards.

Avant la journée d'hier, l'indice avait progressé de 8,1% depuis sa création.

Selon le groupe Kachan&Co, il faut s'attendre à des changements dans la façon de financer les inventions propres. Le capital-risque perdra de l'importance pour faire place aux grandes entreprises, qui investissent des sommes de plus en plus importantes pour s'approprier les nouvelles technologies.

Une entreprise comme General Electric, par exemple, a déjà misé plus de 200 millions US sur les technologies vertes. La multinationale japonaise de l'électronique Sharp a récemment avalé l'entreprise d'énergie solaire Recurrent Energy, tandis que l'important producteur d'énergie Constellation mettait la main sur l'entreprise d'efficacité énergétique CPower.

«Nous anticipons une augmentation des fusions et acquisitions dans le monde des technologies propres en 2011, et ce même si l'activité a atteint des niveaux records en 2010», écrit Kachan&Co.