Les attentes étaient faibles. Il n'y aura eu ni surprise ni déception dans la dernière annonce de taux de la Réserve fédérale américaine (Fed), cette année.

Son Comité de politique monétaire reconduit sans changement ses achats d'actifs à grande échelle (Large Scale Asset Purchases, ou LSAP), une expression qu'il préfère à celle de «détente quantitative» privilégiée par les économistes et les experts financiers.

Les achats d'obligations du Trésor américain se poursuivront donc d'ici la fin de juin au rythme d'environ 75 milliards US par mois, somme à laquelle s'ajouteront de 30 à 35 milliards US par mois. Ils sont le produit de l'encours de titres déjà détenus par la Fed qui arrivent à échéance.

En tout, les LSAP représenteront une injection de 600 milliards US dans l'économie d'ici la fin de juin et les réinvestissements, encore de 250 à 300 milliards US.

La Fed maintient aussi sans surprise la fourchette de négociation de 0% à 0,25%, mise en place il y a maintenant deux ans, «pour une durée prolongée».

Elle ne commente pas les résultats obtenus jusqu'ici par ces mesures extraordinaires de détente monétaire, annoncées lors de la réunion du 3 novembre.

Un des objectifs avoués était d'exercer des pressions à la baisse sur les taux des obligations à moyen et long termes, de manière à stimuler le crédit aux entreprises et l'accessibilité à des prêts hypothécaires.

«Cet aspect de la phase initiale de cette deuxième ronde de détente monétaire n'est pas un succès complet», avance prudemment Michael Gregory, économiste principal chez BMO Marchés des capitaux.

C'est peu dire. Depuis le 3 novembre, les taux des obligations américaines venant à échéance dans 7 et 10 ans ont rebondi de 90 et 100 centièmes. Les taux des 10 ans ont même grimpé de près d'une dizaine de centièmes, à 3,45%, dans les minutes suivant la décision de la Fed.

«On en saura peut-être un peu plus avec la publication du procès-verbal de la réunion (dans trois semaines), suggère Martin Schwerdfeger, économiste chez TD. Après tout, il est difficile de distinguer si les rendements augmentent parce que la détente monétaire renforce les perspectives de croissance ou parce que les marchés escomptent un risque accru d'inflation à terme.»

C'est cette dernière hypothèse que retient Thomas M. Hoenig. Le président de la Fed de Kansas City, qui ne votera pas l'an prochain, a exprimé sa dissidence pour la huitième fois en autant de décisions cette année. À ses yeux, compte tenu de l'amélioration de l'économie, «le degré élevé d'accommodement monétaire va accroître les risques de futurs déséquilibres économiques et financiers de même que les attentes d'inflation à long terme susceptibles de déstabiliser l'économie», lit-on à la fin du communiqué de la Fed qui est presque une copie conforme de celui du 3 novembre.

Il prend néanmoins acte des progrès de la reprise, mais «à un rythme insuffisant pour faire diminuer le chômage». Il s'élevait à 9,8%, le mois dernier et colle à au moins 9,5% depuis le début de la reprise, il y a 18 mois.

La Fed s'inquiète aussi de la faiblesse de l'inflation. Celle qui exclut les aliments et l'énergie progressait au rythme d'escargot de 0,6%, en octobre. Le chiffre de novembre sera connu ce matin et on n'attend guère d'amélioration.

À sa prochaine réunion, le 26 janvier, 4 des 12 membres votants du Comité de politique monétaire seront remplacés, dont M. Hoenig. Parmi les nouveaux venus, Charles Plosser (Fed de Philadelphie) et Richard Fisher (Fed de Dallas) sont réputés aussi faucons que lui.