AlertPay, un site montréalais de transactions en ligne en croissance fulgurante avec 5,3 millions d'abonnés dans le monde, est à vendre. Un bloc de 51% des actions appartenant au PDG, Firoz Patel, a été saisi en justice pour être vendu à la suite d'un placement qui a mal tourné.

> Suivez Vincent Brousseau-Pouliot sur Twitter

Les actions de Firoz Patel ont été saisies en justice par Patrick Massé, un investisseur mécontent. Elles ont été offertes à deux reprises dans un encan judiciaire, dont la dernière fois le 1er décembre dernier. Chaque fois, les actions d'AlertPay n'ont pas trouvé preneur. Ce n'est pas faute d'intérêt: une firme d'investissement de New York, Insight Venture Partners, serait intéressée à acquérir AlertPay. Insight Venture, qui n'a pas voulu faire de commentaires à La Presse Affaires, détient notamment des actions du site de microblogage Twitter. Un nouvel encan peut avoir lieu à la discrétion de Patrick Massé dans un délai de 30 jours.

«Les gens de New York veulent être sûrs que tous les actifs d'AlertPay sont dans l'entreprise saisie. C'est le jeu du chat et de la souris dans un contexte technologique. Tu ne peux pas mettre la main sur un site web comme sur un bien physique. C'est plus difficile de saisir un site web», dit Me Sylvain Racette, avocat de Patrick Massé, qui a obtenu la permission des tribunaux de saisir les actions d'AlertPay.

Selon Me Racette, Firoz Patel aurait transféré en janvier dernier le nom de domaine AlertPay.com et d'autres actifs d'AlertPay dans Ceptum AB, une entreprise de Firoz Patel enregistrée en Suède et contrôlée par une société britannique. Me Racette songe à déposer une requête afin de forcer Ceptum AB à remettre ces actifs à AlertPay. L'avocat de Patrick Massé doit recevoir les états financiers d'AlertPay et de Firoz Patel au cours des 10 prochains jours.

Même si ses actions d'AlertPay sont sous le contrôle de la justice, Firoz Patel n'est pas inquiet de perdre le contrôle de l'entreprise qu'il a fondée avec son frère Ferhan en 2004. «Seules, les actions n'intéressent personne. Un acheteur doit consulter les renseignements financiers d'une entreprise privée avant de l'acheter», dit le PDG d'AlertPay. Firoz Patel fait notamment valoir que son frère Ferhan, qui détient 49% des actions d'AlertPay, a un droit de premier rachat sur les actions saisies.

Croissance fulgurante

AlertPay, concurrent du site de transactions en ligne PayPal d'eBay, connaît une croissance fulgurante depuis sa création en 2004. Au cours des 18 derniers mois, l'entreprise a vu son nombre de membres passer de 3,1 à 5,3 millions, une hausse de 71%. L'entreprise, dont le chiffre d'affaires a été évalué à 8,4 millions de dollars pour les six premiers mois de 2009, compte 90 employés à Montréal et vient d'ouvrir un bureau de 20 personnes à Mumbai, en Inde.

Selon Firoz Patel, le feuilleton judiciaire l'opposant à Patrick Massé n'aura pas d'incidence sur son entreprise. «Les procédures n'auront pas d'impact négatif sur les activités d'AlertPay, notamment le niveau de sécurité de nos transactions en ligne», dit-il.

Firoz Patel s'est fait saisir ses actions d'AlertPay à la suite d'un placement qui a mal tourné, au point où il est aujourd'hui poursuivi pour 2,5 millions de dollars. Selon les documents de la Cour, Patrick Massé et d'autres investisseurs lui ont remis en 2006 une somme de 934 500$ à être déposée dans un compte de Credit Suisse. L'investissement devait faire partie d'un prêt de 100 millions US de la Banque mondiale du commerce avec des intérêts de 6%.

Dans sa poursuite, Patrick Massé, qui détient des intérêts dans des mines en Afrique, allègue que l'argent a été investi à l'encontre de ses directives par Firoz Patel dans l'entreprise mexicaine Air Temp North America. M. Patel nie et poursuit M. Massé pour 1,5 million de dollars. Leur litige sera entendu sur le fond par la Cour supérieure en 2012.

En juillet 2009, les deux parties ont conclu une entente sur une partie du litige en vertu de laquelle M. Patel devait remettre 300 000$ à M. Massé pour paiement partiel.

Le PDG d'AlertPay a contesté l'entente en cours, mais les tribunaux l'ont validée et ont autorisé la saisie avant jugement des actions d'AlertPay et de ses autres propriétés. «Ils ont un jugement, mais c'est une petite bataille avant la guerre, dit le PDG d'AlertPay. On est certain qu'on va gagner et que le 300 000$ va être cassé.»