Allergiques aux règlements, le monde des affaires? C'est loin d'être le message lancé hier au deuxième forum québécois sur les technologies propres, alors que des entreprises ont réclamé à grands cris des lois environnementales plus strictes.

Plusieurs participants ont dit mal digérer de voir des pays comme l'Allemagne, le Danemark, la Suède et même la Chine s'imposer comme des puissances mondiales des technologies propres grâce à leur réglementation environnementale sévère pendant que le Québec traîne la patte.

 

«Aujourd'hui, on fait zéro pour cent de nos affaires au Québec. Le terrain de jeu n'est pas au Canada et au Québec. Il est aux États-Unis, en Europe, en Asie, en Australie. Pourquoi? Parce que nos politiciens ne font pas leur job», a tonné Guy Drouin, président de Biothermica Carbone, une firme québécoise de valorisation des biogaz.

«Ça fait 15 ans qu'on attend une réglementation sur la qualité de l'air», a aussi lancé Thierry Pagé, grand patron d'Odotech - une entreprise qui fabrique des nez électroniques pour détecter les odeurs et qui vient de décrocher un important contrat... à Hong-Kong.

Consultants et universitaires ont aussi pointé le cadre réglementaire pour expliquer le retard du Québec sur la vague des «clean techs» qui déferle sur la planète.

Bien difficile, en effet, de vendre de nouveaux systèmes pour purifier l'air, l'eau et le sol si personne n'oblige les grandes entreprises et les gouvernements à les utiliser. Même Cascades, pourtant davantage un acheteur qu'un vendeur de technologie verte, a dit préférer faire des affaires là où elle est surveillée plus étroitement!

«On a des usines en France, en Allemagne, en Suède, en Belgique. Les réglementations sur les émissions dans l'air sont pratiquement le double plus sévère qu'au Québec. Mais ça ne nous fait pas peur» a dit Antoine Baril, de chez Cascades.

Selon lui, des réglementations accompagnées de subventions permettent d'acquérir les nouvelles technologies et d'améliorer la compétitivité des entreprises.

Guy Drouin, de Biothermica, affirme que les «règlements de dinosaures du Québec» - celui sur la qualité de l'air daterait de 1978 - freinent l'essor d'un marché local, obligeant les boîtes de technologie québécoises à regarder ailleurs trop tôt dans leur développement.

«Tu deviens un bon joueur de hockey en jouant dans ta ruelle avant d'aller jouer à Boston. Il faut que tu te fasses la main chez vous. Moi, aller faire une usine pilote en Chine ou en Ukraine...»

Les entrepreneurs ont toutefois applaudi la décision du Québec de joindre la Western Climate Initiative, un marché du carbone qui démarrera en 2012.

Denis Leclerc, président d'Écotech Québec, la grappe des technologies propres de la province, explique qu'un chantier sur la réglementation et la fiscalité se mettra en branle prochainement, où on décortiquera ce qui existe ici et ce qui se fait de mieux ailleurs.

«Ensuite, on va aller revendiquer», lance-t-il.

On a aussi appris hier que le Québec compte 420 entreprises de technologies propres. Ses forces sont dans le traitement de l'eau, de l'air et des matières résiduelles, alors que la province est peu présente en énergies renouvelables, probablement à cause de l'ombre créée par Hydro-Québec.