Contrairement à ce que leur nom suggère, les réseaux Fibe, de Bell, et Optik, de TELUS, ne sont pas entièrement composés de fibre optique, constate l'Union des consommateurs. Elle estime ces services trompeurs, et incite l'industrie canadienne des télécoms ainsi que l'organisme qui les supervise, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), à plus de transparence en matière technologique.

Phénomène grandissant à l'échelle de la planète, les réseaux de fibre optique jusqu'à domicile (Fiber to the Home, ou FTTH en anglais) ont certainement inspiré Bell et TELUS. Plus durable et plus performante, la fibre optique possède une bande passante accrue grâce à laquelle les fournisseurs peuvent unifier tous leurs services de communication: internet, téléphonie et télévision. Dans certains pays, comme en France, la fibre à domicile est si avancée qu'un même domicile peut être relié à quatre réseaux différents en même temps. Le propriétaire n'a qu'à se brancher au fil du fournisseur de son choix.

 

Bell a lancé son nouveau service Fibe en février dernier. Fruit d'un investissement de 2 milliards de dollars qui s'étale sur trois ans, ce réseau composé de fibre optique est pour le moment limité à la région de la Ville de Québec. Les secteurs desservis peuvent ainsi profiter de la télévision par internet (télé IP) et d'un débit internet pouvant atteindre 100 mégabits/seconde, de 10 à 15 fois supérieurs à son service de base offert ailleurs au pays.

À la fin de ce plan triennal, Bell prévoit que 2 millions de foyers seront branchés à son réseau de fibre optique, ce qui en fera le plus important réseau FTTH au pays.

Des chiffres embellis

L'Union des consommateurs n'est pas d'accord. Selon l'organisme québécois, la publicité faite autour de ces réseaux est trompeuse. «Leur réseau est fait de fibre en partie seulement et ne se rend pas jusqu'au domicile, sauf dans quelques quartiers où la technologie est présentement à l'essai», fait valoir Me Anthony Hémond, spécialiste des questions liées aux télécommunications pour l'Union des consommateurs.

Me Hémond ne vise pas Bell ni TELUS en particulier. Il déplore le manque de transparence de l'ensemble des fournisseurs canadiens de services internet. En vantant le débit le plus élevé possible offert de façon très limitée sur leur réseau, ils leurrent des consommateurs, qui obtiennent en réalité un service de moins bonne qualité.

Plusieurs facteurs affectent le débit d'une connexion internet, du nombre de voisins clients d'un même fournisseur à l'utilisation de plusieurs services à la fois. Les fournisseurs ne le mentionnent pas non plus, continue-t-il.

«Il y a un manque de transparence vis-à-vis des services offerts au Canada. Le consommateur n'obtient qu'une information partielle et très limitée. En France, le consommateur peut comparer tous les services disponibles à son domicile d'un seul coup d'oeil, avec les vrais chiffres. Ça permet de faire jouer la concurrence à son profit. Ici, cette concurrence est inexistante.»

En France, des poursuites de consommateurs insatisfaits ont poussé l'industrie des télécoms à proposer des tests d'éligibilité en ligne, indiquant le niveau de qualité réel de leur service en fonction de l'adresse du client.

L'Union des consommateurs aimerait que les télécoms canadiennes suivent l'exemple français, et elle demande au CRTC d'intervenir en ce sens. «Les fournisseurs se livrent une guerre de chiffres à travers leur publicité, qui induit les consommateurs en erreur. C'est une très mauvaise pratique, et c'est le consommateur qui paie la note. Si l'industrie ne veut pas revoir ses pratiques, c'est au CRTC de les ramener à l'ordre», dit Anthony Hémond.