«Je suis bien content. Bien, bien, bien, bien content!»

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Roger Fournier était un homme heureux, hier. Celui qui est premier directeur principal, Environnement et gaz à effet de serre, chez Raymond Chabot Grant Thornton a regardé avec appréhension les Californiens voter mardi sur une question qui aurait facilement pu faire dérailler les marchés du carbone de toute l'Amérique du Nord.

Il a finalement poussé un soupir de soulagement. La proposition 23, qui visait à suspendre les lois climatiques en vigueur en Californie, en raison des difficultés économiques qui y sévissent, a finalement été défaite par 61,4% des électeurs en marge des élections de mi-mandat qui se tenaient aux États-Unis.

En clair, cela signifie que la Californie demeurera au sein de la Western Climate Initiative (WCI), un futur marché du carbone auquel participera aussi le Québec.

Selon les observateurs, le retrait de la Californie, un pionnier de la lutte contre les changements climatiques, aurait eu l'effet d'une bombe et aurait pu compromettre le développement des marchés du carbone en Amérique du Nord et même dans le monde entier.

«On accueille favorablement la décision des Californiens de demeurer au sein de la WCI, et nous allons poursuivre nos efforts communs pour la mise en place d'un marché du carbone», a dit hier Sarah Shirley, attachée de presse du ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs, Pierre Arcand.

La WCI, qui regroupera sept États américains et quatre provinces canadiennes, obligera ses grands émetteurs à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. Les entreprises visées pourront toutefois choisir d'acheter des crédits de carbone à d'autres entreprises plutôt que d'effectuer elles-mêmes leurs réductions, ce qui devrait créer un marché du carbone entre les membres.

«C'est une grosse incertitude qui vient de tomber», a commenté Jean Nolet, président de la firme québécoise Écoressources consultants, maintenant confiant que la WCI se mettra bel et bien sur pied.

La proposition 23 avait déclenché une vaste campagne en Californie. Les pétrolières texanes Valero et Tesoro étaient entre autres montées au front pour faire suspendre les lois climatiques, tandis que l'ancien gouverneur Arnold Schwarzenegger et le célèbre producteur de films James Cameron avaient milité pour le contraire.

Le résultat du vote en Californie a eu pour effet de relancer hier les discussions en vue d'unir la WCI à la Regional Greenhouse Gas Initiative et le Midwestern Greenhouse Gas Reduction Accord, deux autres marchés régionaux nord-américains.

Quand les tomates génèrent des crédits

Toujours dans le domaine des crédits de carbone, l'entreprise Les Serres du Saint-Laurent est devenue hier la toute première au Québec à générer des crédits de carbone reconnus par la norme internationale Volontary Carbon Standard, un accomplissement qui pourrait justement lui ouvrir les portes de la Western Climate Initiative.

En chauffant les serres servant à produire ses fameuses tomates Savoura au biogaz plutôt qu'au gaz naturel, l'entreprise empêchera l'émission de 7200 tonnes par année dans l'atmosphère.

L'entreprise a choisi d'enregistrer ses crédits selon l'une des normes les plus strictes au monde. Selon la firme Écoressources consultants, cela maximisera la valeur des crédits générés et augmentera leurs chances d'être un jour reconnus dans un futur marché réglementé comme la WCI.

Les Serres du Saint-Laurent est la deuxième entreprise de tout le Canada à générer des crédits reconnus par la norme Volontary Carbon Standard.