Cinq ans après avoir fermé sa cuisine à l'heure du lunch, Toqué! ouvre aujourd'hui à nouveau ses portes le midi. C'est un deuxième départ pour le restaurant montréalais de la place Jean-Paul-Riopelle. Car un an après son déménagement, de la rue Saint-Denis au Quartier international, en 2004, son chef et copropriétaire Normand Laprise constatait que l'aventure n'avait pas été concluante.

«On a gardé une formule un peu trop sérieuse, avec menu gastronomique et avec autant d'effectifs le midi que le soir, explique-t-il. Une formule que Montréal n'était peut-être pas prêt à recevoir compte tenu de sa masse de gens d'affaires. Les gens nous gardaient pour les occasions spéciales.»

Il y aurait également eu cette note de la Caisse de dépôt, dans le même édifice où loge le Toqué! , pour expliquer l'échec de l'opération du midi... «Le président de la Caisse a fait circuler, à l'époque, un mémo disant qu'il n'avait rien contre le fait que les employés mangent chez nous, mais pas sur leur compte de dépenses, affirme Normand Laprise. Ça nous a affectés.»

Pour cette deuxième prise, Laprise et sa partenaire Christine Lamarche ont repensé le menu, le temps consacré au lunch et même le mobilier. Ils ont simplifié la formule, réduit le nombre de mains impliquées et les coûts d'exploitation à plusieurs niveaux. Les menus offerts, à environ 25$ ont désormais deux services. Le nombre de mouvements par plat (dans la préparation finale dans l'assiette) est passé d'une dizaine à sept au maximum. C'est aussi autour de tables en bois, nouvelle acquisition du Toqué!, et non de tables recouvertes de nappes en coton qu'on assoit la clientèle. «Laver à la main les nappes en coton égyptien (d'une valeur de 45$) coûte au minimum 4$, explique Normand Laprise. Cela dit, on conserve le côté sophistiqué du restaurant.»

On promet que le client pourra régler la note en une heure. Et cela, avec un service aussi personnalisé et le coût des aliments qui demeurera de 30 à 40 cents par dollar dépensé. «On roulait bien à l'époque, raconte Normand Laprise. On servait de 50 à 60 couverts le midi, mais on n'arrivait pas. On était dans le rouge. La structure était très grosse. Cette fois, la formule est plus conviviale et accessible. On vise 70 couverts le midi donc des rentrées d'environ 2500$ à 3000$ par jour.»

Le quartier qui arrive à une certaine maturité et la popularité le midi de son dernier-né (Brasserie T!, non loin) ont aussi motivé Normand Laprise à gonfler les heures d'ouverture du Toqué!.

Cette décision arrive à une époque où les gens ne souhaitent pas forcément s'éterniser loin du bureau pour le lunch, mais où la demande pour des repas haut de gamme se maintient. «Il y a 15, 20, 30 ans, tout se réglait à la table, dit Normand Laprise. Aujourd'hui, on rencontre son client une première fois au restaurant, puis le reste se fait par courriel et internet. On retourne au restaurant pour célébrer la signature d'un contrat.»

«Les gens veulent de la rapidité le midi, soutient aussi Cyril Duport, directeur de la restauration du Groupe Europea (Europea, Andiamo, Cafe Birks).

La direction de l'Europea a donc aussi modifié sa formule-midi, il y a deux ans, avec table d'hôte à deux services (de 24,50$ à 29,50$). «Et on propose les desserts sur plateau pendant qu'on sert le repas principal», explique Cyril Duport.

De son côté, Carlos Ferreira, propriétaire du café Ferreira et du Vasco de Gamma, a trouvé la solution idéale pour ceux qui recherchent de la nourriture haut de gamme sans sortir du bureau. Il ne suffit que de commander sur son site lunchmontreal.com un repas qui se détaille à 18$. «Les gens sentent le besoin de rester au bureau surtout à cause des fuseaux horaire de l'Europe, estime Carlos Ferreira. Avec lunchmontreal.com, on propose de la nourriture équilibrée, de très haut niveau, et non un simple sandwich. C'est comme si le client se déplaçait au restaurant.»