Quebecor demande au CRTC de mettre fin au monopole de Super Écran en matière de télé payante. Et ce n'est pas tout: Pierre Karl Péladeau veut aussi forcer les studios d'Hollywood à partager leurs films.

Quebecor tente de lancer une chaîne payante de films et de séries télé depuis 2006 afin de concurrencer Super Écran, seule chaîne de télé francophone en son genre au Canada depuis 27 ans. La chaîne d'Astral Média est actuellement protégée contre l'arrivée de concurrents par la réglementation du CRTC. Quebecor demande au CRTC d'ouvrir la télé payante à la concurrence et de forcer Hollywood à négocier également avec les futurs concurrents de Super Écran. Le CRTC tranchera sur la requête de Quebecor Média cet automne.

Selon Quebecor, les ententes d'exclusivité entre les studios d'Hollywood et Astral empêchent l'éclosion d'un véritable rival à Super Écran, qui acquiert d'un coup tous les films d'un même studio. Il s'agirait d'un «obstacle insurmontable» pour une nouvelle chaîne selon Quebecor. «La non-disponibilité (du contenu) est artificielle et engendrée par le comportement du joueur dominant (Astral Média)», écrit Quebecor dans sa requête au CRTC.

Astral Média estime que le marché francophone du Canada n'est pas assez grand pour faire vivre deux réseaux payants de films comme Super Écran, qui a néanmoins généré des profits de 21 millions en 2009. Il s'agit d'une marge de profit de 34%.

Selon les documents présentés au CRTC par Astral, un concurrent à Super Écran «n'augmentera pas l'offre mais fera seulement la fragmenter». Il y a aura aussi une surenchère pour l'acquisition de films américains dont les «principaux bénéficiaires seront les distributeurs d'Hollywood». Selon Astral, les consommateurs paieraient plus cher pour «deux chaînes pour finir avec le même type de contenu offert par une seule (chaîne)».

La vice-présidente et directrice générale d'Astral Télé Réseaux, Johanne Saint-Laurent, se dit «étonnée» de la demande de Quebecor puisque le CRTC a statué sur la question il y a deux ans quand il a brisé les monopoles des chaînes sportives et des chaînes d'information continue. «Quebecor veut la duplication totale des films en pensant qu'Hollywood va changer ces pratiques. Où sera la diversité pour le consommateur? En plus, la concurrence existe déjà de plusieurs façons pour Super Écran avec la sortie des films au cinéma, à la télé à la carte et sur l'internet», dit Johanne Saint-Laurent en entrevue à La Presse Affaires.

Astral Média s'inquiète aussi de la possibilité de «concurrence inégale» entre Super Écran et une chaîne payante de Quebecor Média, qui compte sur le plus important câblodistributeur au Québec en Vidéotron. Bell a fait état de préoccupations similaires au CRTC.

Le CRTC a refusé d'octroyer une licence de télé payante à Quebecor pour BOOMTV en 2007. Le Groupe TVA, filiale de Quebecor Média, détenait jusqu'en mars dernier une licence pour Première loge, une chaîne de télé payante ne pouvant diffuser que 25% de films. Super Écran n'a pas de telles restrictions et peut diffuser 100% de films. La licence de Première loge a-t-elle été renouvelée? Quebecor Média n'a pas rappelé La Presse Affaires.

Par ailleurs, le CRTC a accordé hier deux licences de chaînes spécialisées au Groupe TVA. La distribution de TVA Mode et Star Système, des chaînes portant sur le milieu de la mode et le milieu artistique, ne sera pas obligatoire.