La portion des Québécois âgés de 55 à 64 ans qui restent sur le marché du travail se compare avantageusement à celle des pays de l'Union européenne, bien que l'âge de la retraite effective soit ici parmi les moins élevés.

Voilà ce qui ressort d'une comparaison détaillée entre les situations québécoise et européenne établie par les économistes Joëlle Noreau et Chantal Routhier, de Desjardins.

En analysant les données d'une étude publiée par Natixis sur la situation au sein de l'Union européenne et les statistiques disponibles ici, elles ont tenté d'établir si le taux d'emploi dans cette cohorte pourrait s'améliorer.

Le vieillissement de la population a pour effet de diminuer le taux de chômage, observent-elles. De fait, le taux de demandeurs d'emploi a fortement diminué au cours de la première décennie du siècle, tandis que le nombre de Québécois de 55 ans et plus toujours actifs sur le marché du travail a doublé pour atteindre 600 000 travailleurs.

L'an dernier, le taux d'emploi des Québécois de 55 à 59 ans s'établissait à 62%, comparativement à 67% pour la moyenne canadienne et 68,3% chez l'Oncle Sam. La performance du Québec est plus élevée que la moyenne européenne, mais celle-ci cache d'importants écarts: plus de 80% au Danemark, en Norvège et en Suède, moins de 60% en France, en Italie et en Grèce, à peine plus de 30% en Turquie.

Chez les 60-64 ans, le taux d'emploi au Québec s'établit à 39%, ce qui reste moins élevé qu'au Canada (47%) et aux États-Unis (51,5%). C'est toutefois beaucoup mieux que la moyenne européenne (à peine plus de 30%) qui cache encore des écarts considérables. En Suède et en Norvège, le taux dépasse les 60%, mais en France, en Belgique, en Italie et en Pologne, il n'atteint pas 20%.

Outre le taux de chômage, les explications avancées pour de tels écarts reposent aussi sur la proportion des 60 ans et plus dans la population active et l'âge légal de la retraite.

Au Québec en 2008, 19,5% de la population active (qui détient ou recherche un emploi) avait au moins 60 ans. La moyenne européenne est de 10,9%, mais elle est beaucoup plus élevée en Allemagne ou en Italie (25%) et en Suède (24%).

Les auteures font observer que cette cohorte augmente rapidement au Québec. En 1996, elle formait à peine 15% de la population active.

Il existe aussi d'importantes disparités quant à l'âge légal de la retraite: de 60 ans en France et en Turquie, jusqu'à 67 ans au Danemark, plusieurs pays ayant même des seuils moins élevés pour les femmes, ce qui serait ici considéré comme de la discrimination sexuelle, en vertu de nos chartes des droits.

Dès lors, il est moins surprenant que le taux d'emploi soit moins élevé en France qu'au Danemark ou en Suède, chez les 60 ans et plus.

Chose mal comprise, les auteures rappellent qu'il n'y a pas d'âge légal de la retraite au Québec bien que les prestations de la Régie des rentes soient disponibles à partir de 60 ans et celles de la sécurité de la vieillesse versées par Ottawa à 65 ans.

Dans les faits, l'âge moyen de la retraite, définie par la Régie comme «la diminution de l'activité rémunératrice et une substitution, du moins partielle, du revenu par un revenu de retraite», est de 59,9 ans pour les hommes et de 59,5 ans pour les femmes. Seuls les Français et les Polonais prennent leur retraite plus tôt.

La grande faiblesse de l'étude Natixis est d'ignorer les grandes disparités d'épargne-retraite entre les pays. Dans plusieurs, le revenu de retraite est lourdement tributaire de l'État, alors que, dans d'autres, comme le Canada, l'épargne-retraite et les régimes complémentaires assurent une grande part des rentrées de fonds des retraités.

Voilà qui explique peut-être la grande prudence des auteures dans leur prévision. «Il faut s'attendre à une augmentation du taux d'emploi à la fois chez les 55 à 59 ans, les 60 à 64 ans de même que chez les 65 ans et plus», écrivent-elles simplement.