Le printemps doux et l'entrée en forte activité d'un volcan islandais au nom impossible ont ralenti les échanges commerciaux du Canada en avril.

Malgré un recul de 1% de la valeur des exportations (le deuxième d'affilée après six mois de hausse) et de 2,2% des importations, le solde commercial donne un léger excédent de 175 millions, a rapporté hier Statistique Canada.

Ce résultat est en deçà des attentes des experts, d'autant plus que l'agence fédérale a aussi révisé l'excédent de 300 millions de mars, qui devient un déficit de 200 millions.

Ces chiffres décevants ont vite été comparés à ceux du solde commercial américain de biens et de services. Le déficit est passé de 40,0 milliards à 40,3 milliards de mars à avril.

Il est le solde d'une diminution plus grande des exportations que des importations. C'est le pire résultat depuis décembre 2008, ce qui laisse craindre un ralentissement de la reprise américaine puisque le commerce extérieur ne compense pas la faible demande intérieure.

Un examen plus attentif permet de croire qu'il s'agit peut-être davantage d'un hiatus circonstanciel que d'un renversement.

Les exportations canadiennes vers l'Europe ont plongé de 14,3%, de mars à avril, à cause surtout de l'interruption du trafic aérien sur l'Europe pendant plusieurs jours et d'un retour à la normale des ventes d'or au Royaume-Uni après un bond exceptionnel en mars.

Vers les États-Unis, la valeur et les volumes d'expédition de produits énergétiques ont diminué, à cause d'une baisse de la demande de gaz naturel et d'un recul plus prononcé encore de son prix.

Dans l'ensemble, les échanges canado-américains ont toutefois légèrement augmenté, de sorte que le surplus commercial avec notre principal partenaire est demeuré stable à hauteur de 3,8 milliards.

«L'amélioration de la balance commerciale en avril est attribuable aux marchandises autres que l'énergie, plus précisément aux machines et équipements, ainsi qu'aux biens industriels», note Marc Pinsonneault, économiste à la Banque Nationale. Il signale aussi que les volumes d'importations de machines et d'équipement étaient en nette hausse en avril, signe que nos entreprises ont profité de la force relative du huard pour se réoutiller.

La reprise bien ancrée

Si les volumes des exportations sont restés stables en avril, la tendance des six derniers mois affiche une nette amélioration. Cela paraît confirmer que le Canada profite de la forte reprise dans les pays émergents.

La Chine, notamment, importe davantage qu'avant la récession mondiale, depuis bientôt un an. Elle a établi en avril un nouveau record d'exportations.

La reprise mondiale paraît donc bien ancrée, malgré les déboires européens. Et même là, le Canada s'en tire assez bien. «Les exportations vers les pays de l'Union européenne, excluant le Royaume-Uni, ont été en hausse de 8,8% en avril, signale Marie-Claude Guillotte, économiste chez Valeurs mobilières Banque Laurentienne. Néanmoins, la part qu'occupe cette région dans les exportations totales demeure très faible, à environ 5% en 2009.»

En fait, l'Europe ne représente plus que 14% du produit intérieur mondial et sa croissance a été anémique au cours de la dernière décennie. La reprise actuelle peut se poursuivre sans elle «surtout grâce à la puissante poussée des marchés émergents», notent Douglas Porter et Benjamin Reitzes, de BMO Marchés des capitaux.

Le défi pour le Canada reste donc de se lancer à la conquête de ces marchés et d'améliorer le bilan de ses échanges commerciaux dans le secteur des services, selon le Conference Board du Canada.

«Bien que le Canada profite de certains secteurs clairement vigoureux sur le marché mondial, il se trouve aussi face à des concurrents exceptionnellement féroces et ne peut plus compter sur un dollar faible ou la proximité du marché américain, note Glen Hodgson, son économiste en chef. C'est pourquoi il doit concentrer ses efforts en matière de politiques commerciales.»

Cela exigera une collaboration plus étroite encore entre Ottawa, les capitales provinciales et le monde des affaires.