Quebecor a annoncé mardi que Kory Teneycke, qui était il y a un an à peine porte-parole principal du premier ministre Harper, sera dorénavant responsable de son bureau d'Ottawa et qu'il sera assisté de l'ancien porte-parole de Brian Mulroney, Luc Lavoie.

Un communiqué de presse précise que M. Teneycke, qui n'a pas d'expérience journalistique, relèvera directement du PDG Pierre Karl Péladeau et qu'il portera aussi le titre de vice-président au développement.

La firme, propriétaire des journaux Sun Media, du Journal de Montréal, du Journal de Québec et de TVA, n'a pas précisé quelles seraient les responsabilités des deux hommes. Kory Teneycke, quant à lui, n'a pas voulu commenter l'impact qu'aura son arrivée sur le traitement de l'information dans la plus vaste chaîne de journaux du pays.

«Tout deviendra plus clair bientôt. Nous en aurons plus à dire dans un très proche avenir, mais je n'ai pas de commentaire pour le moment», a-t-il dit. Même réponse du côté de Quebecor et de Luc Lavoie.

Mercredi, au cours d'une réunion de plus d'une heure avec les membres de sa nouvelle salle de rédaction, M. Teneycke a déclaré que Quebecor annoncera mardi prochain son projet de créer une nouvelle chaîne d'info continue en anglais dans le genre de Fox News, aux États-Unis. Le CRTC n'aurait toutefois pas encore donné son autorisation.

Inquiétudes

La nouvelle a créé une onde de choc dans les milieux journalistiques, tant du côté des employés touchés que chez leurs confrères des autres réseaux et les observateurs. Tous ont toutefois appelé à la prudence avant de porter un jugement.

«N'importe qui, comme moi, va juger a priori que c'est inquiétant et que ça présuppose une intention de coloration politique. Mais encore faut-il les voir aller», a dit le responsable du programme de journalisme à l'Université de Montréal, Robert Maltais.

«Je ne lui prête pas de mauvaises intentions ; je ne sais pas ce qu'il va faire. Mais s'il s'en va là et si c'est un projet pour donner une plus grande visibilité à des idées conservatrices, on passe un peu à côté de la mission sociale d'informer et de le faire avec le sens de l'équilibre et de la rigueur», a renchéri le président de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, Brian Myles.

Prudence

Peu de politiciens fédéraux ont souhaité attaquer de front le nouveau chef de bureau du puissant empire médiatique. Le député du NPD Charlie Angus l'a fait mardi dans l'Ottawa Citizen. «Ça sent mauvais, a-t-il dit. Le bureau d'Ottawa a un rôle journalistique à jouer pour la nation. Un gars comme Kory Teneycke n'a pas d'affaire dans ce bureau, à quelque titre que ce soit. Il est un militant partisan de Stephen Harper.»

Mais son collègue néo-démocrate Thomas Mulcair, député d'Outremont, a tenu mercredi des propos beaucoup plus nuancés : «On va continuer à croire que les vrais journalistes peuvent continuer à travailler. Les gens peuvent bien avoir leur expérience d'où ils veulent. On jugera l'arbre à ses fruits.»