Les gouvernements fédéral et provinciaux ont défoncé leurs budgets de 65 milliards $ au cours de la dernière décennie, une transgression qui revient les hanter en cette ère de déficits, selon une nouvelle étude.

L'index «Pinocchio» annuel de l'Institut C.D. Howe suggère que les gouvernements avec le plus de marge de manoeuvre fiscale - particulièrement les provinces riches en ressources naturelles comme l'Alberta et la Saskatchewan - sont celles qui ont vu leur nez s'allonger le plus au cours des dix dernières années.

Mais même les gouvernements fédéraux, tant celui des conservateurs actuels que celui de son prédécesseur libéral, ont fréquemment dépensé plus que ce qui était prévu aux budgets qu'ils présentaient et qui étaient approuvés par le parlement.

Pendant une période de 10 ans se terminant avec l'année 2009, Ottawa a enregistré un dépassement budgétaire cumulatif de 21,7 milliards $.

«C'est beaucoup d'argent», a déclaré William Robson, l'administrateur général de C.D. Howe.

«Si Ottawa et les provinces avaient respecté leurs budgets, quand la récession aurait frappé, il aurait été possible d'enregistrer des déficits modestes sans craindre ce que l'on voit en Europe et aux États-Unis», a-t-il ajouté.

En mars, le gouvernement Harper a dit qu'il allait afficher un déficit de 53,8 milliards $ pour l'année fiscale venant de se terminer, un chiffre qui sera alourdi de 49,2 milliards $ lors de celle qui sera complétée le 31 mars prochain.

Les économistes prévoient par contre que plusieurs provinces feront face à des compressions fiscales encore plus importantes dans le futur, en bonne partie parce qu'elles auront moins de revenus et seront touchées par les coûts grimpants du système de santé.

De façon peut-être surprenante, considérant sa réputation de province fort dépensière, Québec s'est placée en première place au niveau de l'exactitude - soit la province dont les prédictions budgétaires se sont avérées le plus près des résultats.

Le Nouveau-Brunswick est arrivé bon deuxième à ce chapitre.

L'Ontario - la province la plus populeuse du pays - a excédé son budget de 14,5 milliards $, mais en termes de pourcentage, se place en quatrième place pour son respect des chiffres du budget. Le quasi-effondrement de l'industrie automobile et les coûteux plans de sauvetage dans ce secteur ont contribué à cette situation.

L'Alberta et la Saskatchewan sont les cancres de l'étude. Elles ont connu des dépassements budgétaires respectifs de 11,4 et 3,4 milliards $.

Dans leur cas, une baisse marquée des prix du pétrole et du gaz naturel pendant la récession a comprimé leurs revenus et ralenti l'économie des provinces de l'ouest.

Pour sa part, le gouvernement fédéral arrive en huitième place parmi les 13 juridictions canadiennes.

Le groupe de réflexion économique note que le 65 milliards $ représente les dépassements budgétaires des gouvernements et ne constitue pas un jugement sur la raisonnabilité des budgets eux-mêmes, qui est une toute autre question.

Selon le directeur national de la Fédération canadienne des contribuables, Kevin Gaudet, les gouvernements en général ont été prodigues dans leurs cibles budgétaires alors il n'y a pas d'excuses pour les avoir excédées.

Mais globalement, William Robson dit que les gouvernements canadiens ont fait du bon travail quand on les compare aux pays d'Europe ou aux États-Unis.

«La performance du gouvernement fédéral s'est grandement améliorée avec le temps», a affirmé M. Robson. «Il y a quelques cas de mauvaise gestion, mais selon les standards internationaux, le Canada n'est pas si mal que ça.»