Le «public gazouillant» qui s'en donne à coeur joie sur Twitter ne fait pas que disperser sa propre énergie, comme le disait récemment l'ex-directrice du Devoir, Lise Bissonnette. En utilisant celle qui alimente les serveurs de l'entreprise, il contribue aussi un peu... au réchauffement de la planète.

Les chiffres n'ont rien pour rivaliser avec la pollution générée par l'extraction des sables bitumineux. Mais chaque fois que vous envoyez un «tweet» sur la toile, vous émettez 0,02 gramme de CO2 dans l'atmosphère, selon les calculs de Raffi Krikorian, l'un des développeurs de la plateforme de Twitter.

«Quand vous envoyez un tweet, il nous faut l'acheminer à tous les gens qui vous suivent. C'est comme un facteur qui distribue du courrier: il faut envoyer ça partout», a expliqué M. Krikorian au cours d'une conférence qui s'est tenue la semaine dernière à San Francisco.

Cette distribution informatique consomme de l'énergie - à peu près autant que celle requise pour lever un poids d'un kilo à un mètre du sol, estime grosso modo M. Krikorian. Et comme la grande majorité de la production d'énergie génère des gaz à effet de serre, envoyer ses états d'âme sur Twitter émet du CO2 dans l'atmosphère.

Évidemment, 0,02 gramme par tweet, c'est très peu. Selon certaines études, une recherche sur Google, par exemple, en émet 10 fois plus. Et conduire une petite voiture sur un seul kilomètre émet environ 150 grammes de CO2. Mais avec 50 millions de messages envoyés chaque jour sur Twitter - et le chiffre augmente de façon exponentielle chaque mois - c'est tout de même une tonne de CO2 qui est émise dans l'atmosphère chaque jour par le fameux service de microblogues.

«Nous pouvons faire mieux. Nous travaillons à devenir plus efficaces, et nous serons de moins en moins un destructeur de planète», a dit M. Krikorian (qui a en fait utilisé l'expression planet fucker en anglais).

Un secteur à surveiller

S'il est clair que Twitter ne deviendra jamais un grand pollueur international, les calculs de Raffi Krikorian viennent tout de même rappeler un fait souvent oublié: le secteur des technologies de l'information (TI) et les myriades d'ordinateurs nécessaires à son fonctionnement génèrent aussi des gaz à effet de serre.

Un rapport récent de l'organisation The Climate Group estime que ces émissions atteignent actuellement 500 mégatonnes dans le monde, soit à peu près l'équivalent des gaz à effet de serre émis par le Royaume-Uni au grand complet. Et selon les prévisions du Climate Group, ces émissions seront multipliées par trois d'ici 2020.

«À mesure que l'infra- structure digitale prend de l'expansion, l'appétit de l'industrie des technologies de l'information pour l'énergie augmentera. Ceci en fera une source majeure de changements climatiques, à moins que l'industrie n'adopte et ne fasse la promotion des énergies renouvelables et fasse pression pour que des lois destinées à réduire les émissions soient adoptées», a d'ailleurs écrit Greenpeace dans un rapport consacré aux TI publié ce mois-ci.

Les responsabilités des TI

Greenpeace en a profité pour dénoncer la récente décision de Facebook de construire un nouveau centre de données à Princeville, en Oregon, dont l'électricité proviendra principalement du charbon.

The Climate Group souligne qu'en rendant possible la construction de réseaux de distribution d'électricité intelligents, de bâtiments éco-énergétiques et de procédés industriels et de moyens de transport plus efficaces, le secteur des TI pourrait permettre d'économiser davantage d'énergie qu'il n'en consomme lui-même - l'organisme estime que des réductions d'émissions de 7,8 gigatonnes de CO2 sont ainsi possibles d'ici 2020.

«Mais ce potentiel vient avec des responsabilités. Les réductions d'émissions dans les autres secteurs industriels ne se présenteront pas d'elles-mêmes; le secteur des TI doit faire preuve de leadership sur la question des changements climatiques, et les gouvernements doivent fournir l'environnement réglementaire optimal», écrit l'organisation.

Greenpeace juge de son côté que le secteur des TI fait preuve d'un «leadership inadéquat» dans la lutte contre les changements climatiques.