Si on a pu douter un temps de la robustesse de la reprise canadienne, elle ne fait désormais plus aucun doute.

De septembre à novembre, l'économie a progressé de 5 %, en rythme annuel. Statistique Canada a révélé hier que l'augmentation du produit intérieur brut (PIB) réel avait été de 0,4 % en novembre, soit le double des attentes. L'agence fédérale a en outre révisé d'un dixième de point à la hausse les gains d'octobre (désormais 0,3 %) et de septembre (0,5 %).

De novembre à novembre, le repli n'est plus que de 1,7 %. D'octobre à octobre, le recul atteignait encore 2,8 %.

Fait des plus encourageants, le secteur des biens croît pour le troisième mois d'affilée, à hauteur de 0,6 %, en novembre. Il s'agit d'un rattrapage incontournable en début de reprise. En un an toutefois, il accuse toujours un recul de 8,0 %, plombé par l'extraction (-8,3 %) et la fabrication (-10,6 %).

La production en usine est restée stable en novembre, après cependant deux hausses d'affilée.

L'extraction et l'agriculture ont pour leur part gagné près de 2 %, leur troisième bond consécutif. La construction a progressé pour le quatrième mois d'affilée, reflétant la relance des mises en chantier. Seul le segment des services publics (génération d'électricité, pipelines) accuse un repli que l'agence fédérale attribue au temps très doux (celui de novembre, of course !).

Du côté des services, où est concentrée près des trois quarts de la production de richesse au Canada, la croissance se poursuit. Le secteur gagne du terrain pour le 10e mois d'affilée, malgré le repli de 0,8 % du commerce de détail. En un an, il enregistre même une expansion de 1,2 %.

En novembre, le commerce de gros et les services financiers ont connu les plus fortes augmentations.

Outre les ventes des détaillants, seuls les services professionnels ont connu un léger repli. Ce segment stagne depuis six mois. « Voici les signaux les plus convaincants que la reprise est bel et bien vraie », résume Douglas Porter, économiste en chef adjoint, chez BMO marchés des capitaux.

On pourrait ajouter que le gain de novembre s'est matérialisé au beau milieu de la deuxième vague de la grippe A (H1N1) et de la campagne de vaccination sans précédent qui ont fait perdre des millions d'heures de travail.

Au rythme actuel, l'économie se dirigeait en novembre vers une croissance annualisée de 4,0 % pour le quatrième trimestre.

Cela peut sembler peu en comparaison des 5,7 % annoncés hier par le département du Commerce aux États-Unis. Il s'agit toutefois d'une donnée préliminaire qui sera révisée deux fois. Ces révisions avaient d'ailleurs enlevé beaucoup de leur lustre initial aux chiffres du troisième trimestre.

« L'expansion récente de la production devrait se poursuivre, selon nous, pendant une bonne partie de 2010, surtout avec la reprise de la demande américaine qui profitera aux exportations », fait remarquer Marco Lettieri, économiste à la Financière Banque Nationale (FBN). Plus tôt cette semaine, la FBN avait relevé de 2,9 % à 3,1 % sa prévision de croissance réelle du produit intérieur brut (PIB) canadien, cette année.

La croissance apparemment plus rapide de l'économie américaine étonne cependant d'autant plus que la canadienne a créé en moyenne 18 900 emplois par mois d'août à décembre. Les entreprises américaines ont pour leur part continué de congédier durant la même période.

Sur la lancée de septembre à novembre, la croissance canadienne au quatrième trimestre aura sans doute dépassé de beaucoup la prévision de 3,3 % de la Banque du Canada, qui remonte à deux semaines à peine. Il y a peu, les autorités monétaires canadiennes étaient même accusées de voir la vie en rose.

« Cela ajuste davantage la production canadienne avec les gains des derniers mois sur le marché du travail », résume Avery Shenfeld, économiste en chef chez CIBC.

C'est une nouvelle indication que les taux directeurs exceptionnellement faibles de la Banque du Canada et de la Réserve fédérale américaine (Fed) devront grimper avant longtemps.