Quebecor Media, qui a comme projet de lancer une chaîne de télé sportive, veut briser coûte que coûte le monopole de RDS sur la diffusion des matchs du Canadien de Montréal. Si le CRTC n'accède pas à sa requête, Quebecor Media songe à s'adresser au Bureau de la concurrence, a dit le grand patron Pierre Karl Péladeau dans d'une entrevue exclusive à La Presse Affaires.

La semaine dernière, RDS est devenu le petit cousin «corporatif» du Canadien de Montréal. Deux des actionnaires de la société mère de RDS (CTVglobemedia), BCE et Woodbridge, sont parmi les nouveaux actionnaires minoritaires du Canadien. «Si on achète une équipe de hockey et qu'on se la garde en exclusivité, il y a un avantage indu. (...) C'est anticoncurrentiel. (...) On veut être traité sur un pied d'égalité avec une entreprise ayant des racines intégrées dans un plus grand groupe», dit Pierre Karl Péladeau, président et chef de la direction de Quebecor Media, qui avait tenté sans succès d'acheter le Canadien de Montréal le printemps dernier.

Pour briser le contrat liant RDS au Canadien de Montréal et à la LNH jusqu'à la fin de la saison 2012-2013, Quebecor mise d'abord sur le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), qui étudiera la demande de licence de TVA Sports lundi prochain. «Si ce n'était pas ça (le CRTC), ce serait éventuellement une autre institution (fédérale), dit Pierre Karl Péladeau. Ça pourrait être le Bureau de la concurrence.»

En premier lieu, Quebecor veut que le CRTC empêche un seul réseau de télé (RDS) de diffuser tous les matchs de Canadien de Montréal, comme c'est le cas depuis 2002. L'an dernier, le CRTC a décidé de mettre fin au monopole de RDS sur le marché de la télé sportive francophone. Quebecor fait valoir que RDS conservera un monopole de fait sur ce marché tant que la chaîne gardera les droits de diffusion exclusifs des matchs du Canadien en raison de l'importance du Canadien sur la scène sportive francophone au pays.

Quebecor fait aussi remarquer que deux des nouveaux propriétaires minoritaires du Canadien de Montréal détiennent la majorité des actions de la société mère de RDS, CTVglobemedia (40% pour Woodbridge et 15% pour BCE). Le CRTC s'est doté de règles relatives à la concurrence. «Si CTV se réserve l'exclusivité d'un tel service (les matchs du Canadien) pour alimenter sa propre entreprise, ça nous apparaît inapproprié, dit Pierre Karl Péladeau. C'est contraire aux règles du CRTC qui existent depuis plusieurs années sur les avantages indus.»

La demande de Quebecor Media auprès du CRTC étonne à première vue car Quebecor Media a la réputation de défendre le principe de la déréglementation dans le secteur des télécoms. «On peut être pour la déréglementation, mais nous sommes présentement dans un environnement très réglementé, dit Pierre Karl Péladeau. Je pourrais pousser TVA (au détriment de Radio-Canada) sur Vidéotron, mais je n'ai pas le droit de le faire. C'est la même chose pour CTVglobemedia. Si les règles existent, elles existent pour tout le monde.»

Le grand patron de Quebecor n'a pas voulu préciser combien sa future chaîne TVA Sports serait prête à payer pour diffuser certains matchs du Canadien. RDS, qui possède les droits de diffusion jusqu'à la fin de la saison 2012-2013, paie environ 20 millions de dollars par année pour tous les matchs du Canadien et d'autres matchs de la LNH.