Il n'y a pas de doute, le Canada connaît une bonne reprise économique et cette croissance se poursuivra au cours des deux prochaines années. Toutefois, la montée du dollar canadien, et ses effets néfastes sur les exportateurs, viennent brouiller les cartes.

Voilà essentiellement comment la Banque du Canada voit l'économie canadienne, tel que détaillé dans son Rapport sur la politique monétaire, publié hier.

En 2009, le produit intérieur brut (PIB) du Canada, qui mesure l'ensemble des biens et services produits, aura reculé de 2,4%, prévoit la Banque du Canada. Depuis juin, l'économie a progressé plus rapidement que prévu, mais la vigueur du dollar freinera cette croissance en 2010.

Dans sa livraison de juillet, la Banque du Canada voyait le dollar à 87 cents US. Or, le huard a bondi depuis, en particulier ces dernières semaines, si bien que la Banque place maintenant le dollar canadien à 96 cents US dans son scénario de référence pour les prochains mois.

Selon la Banque, la hausse brusque du dollar est certes attribuable au renchérissement des produits de base, mais il s'explique surtout par la dépréciation du dollar américain par rapport à la plupart des grandes monnaies.

Ce huard à 96 cents US incite la Banque à être plus modeste dans ses prévisions de croissance pour 2010 et 2011. En fait, prévoit la Banque, les deux premiers trimestres de 2010 seront légèrement supérieurs à ce qui était prévu, en rythme annuel, mais les six trimestres suivants de 2010 et 2011 croîtront moins rapidement.

Ainsi, pour l'ensemble de 2010, le PIB canadien grimpera de 3%, soit sensiblement le même niveau que prévu, mais celui de 2011 sera de 3,3%, comparativement au taux de 3,5% précédemment attendu.

«Nous croyons qu'un dollar canadien plus fort appliquera davantage de pression sur la croissance et l'inflation. Ce sera plus facile pour Mark Carney et ses acolytes de rester ancrés sur leurs engagement de maintenir une politique de taux d'intérêt inchangé à 0,25% jusqu'en juillet 2010», a déclaré Michael Gregory, économiste chez Marchés des capitaux BMO.

Benoit Durocher, du Mouvement Desjardins, juge que la Banque du Canada est trop optimiste. «Nous demeurons sceptiques», dit-il.

Selon lui, la Banque avait déjà des prévisions de croissance optimistes pour le troisième trimestre (1,3% en rythme trimestriel annualisé). Or, voilà qu'elle remonte cette cible à 2%. Desjardins rappelle que les économistes, par consensus, voient l'économie croître de 2,4% en 2010, soit passablement moins que les 3% de la Banque.

«Il aurait été préférable que la banque se montre plus prudente dans l'établissement de son scénario économique, comme le veut la coutume au sein des banques centrales», dit-il.

États-Unis, Europe, Japon

Par ailleurs, la Banque du Canada prévoit que l'économie canadienne croîtra un peu moins rapidement que l'économie mondiale. En 2009, l'économie mondiale se contractera de 1,6%, puis elle progressera de 3,1% en 2010 et de 4% en 2011.

Contrairement à ce que certains pourraient penser, la récession a été plus sévère dans la zone euro et au Japon qu'aux États-Unis. La Banque prévoit que l'économie aura reculé de 2,5% aux États-Unis en 2009, contre 3,9% en Europe et 5,7% au Japon.

La reprise sera également plus forte chez nos voisins du Sud qu'outre-mer, selon la Banque. Au cours des années 2010 et 2011, le PIB progressera de 1,8% et 3,8% aux États-Unis, respectivement, comparativement à 0,9 et 2,4% en Europe et 1,7 et 2,5% au Japon.

«Aux États-Unis, les ajustements en cours dans l'économie semblent plus avancés qu'on ne le croyait précédemment», écrit la Banque du Canada dans son rapport.

L'inflation

Selon la Banque, le taux d'inflation au Canada a atteint son creux au troisième trimestre de 2009 (-0,9%), essentiellement en raison du recul des prix annuels de l'énergie.

L'indice de prix à la consommation progressera cependant de 1% au dernier trimestre de 2009, de 1,4% au premier trimestre de 2010 et de 1,6% au dernier trimestre de 2010. La cible de 2% de la Banque devrait être atteinte vers la fin de 2011.

Au Canada, ce sont les consommateurs qui vont donner de l'allant à l'économie en 2010 et 2011. La Banque prévoit en effet que la croissance de la consommation, en données réelles, sera de 1,7 et 1,9%, respectivement, comparativement à 0,1 et 0,9% pour les investissements des entreprises.

Les mesures de stimulation économique des gouvernements n'ont pas encore fait sentir leur pleine mesure, estime la Banque. Les dépenses des administrations publiques progresseront donc de 1,3% en 2010, avant de reculer de 0,3% en 2011.

 

D'OÙ VIENDRA LA CROISSANCE AU CANADA (Taux de variation de divers secteurs économiques)

CONSOMMATION

2010 : 1,7%

2011 : 1,9%

LOGEMENT

2010 : 0,3%

2011 : 0,1%

ADMINISTRATIONS PUBLIQUES

2010: 1,3%

2011: -0,3%

INVESTISSEMENTS DES ENTREPRISES

2010: 0,1%

2011: 0,9%

EXPORTATIONS NETTES

2010: -1,0%

2011: -0,1%

PIB GLOBAL

2010: 3,0%

2011: 3,3%

Source : Banque du Canada