Le groupe de rock irlandais U2 grimpera sur scène ce soir à Tampa, en Floride, grâce à BlackBerry qui commandite sa tournée mondiale.

La campagne de publicité de Research In Motion, «BlackBerry Loves U2», s'inscrit dans une tendance où des marques renommées viennent combler un vide créé par l'amincissement des budgets de marketing des compagnies de disques. Autrefois réticents à s'adresser à des entreprises commanditaires, les artistes sont aujourd'hui bien aises de signer des contrats avec elles.

«BlackBerry a réalisé une publicité télé avec notre musique et la compagnie a ensuite consacré des millions de dollars dans les médias et à la télé à l'échelle mondiale», expliquait hier Paul McGuinness, l'imprésario de U2 au cours d'une entrevue téléphonique depuis Toronto où le groupe s'est produit. «L'entreprise a fourni un budget qu'aucune compagnie de disques n'aurait pu égaler», a-t-il ajouté.

Les maisons de disques ont réduit leurs budgets de marketing tandis qu'elles sont aux prises avec une baisse des revenus tirés de la vente de CD et des taux de piratage aussi élevés que 95% en ce qui concerne la musique téléchargée. À elles seules, les entreprises nord-américaines dépenseront la somme record de 1,08 milliard US en commandites de musique cette année, soit 8% de plus qu'en 2007, selon un rapport de la société IEG Sponsorship. Ces commandites viennent au deuxième rang en importance pour les revenus que touchent les artistes après les concerts en direct.

«Les compagnies de disques sont plus en quête d'argent à cause de ce qui se passe et elles tentent de conclure des marchés plus vastes avec des marques», explique Ian Maude, analyste d'Enders Analysis, de Londres.

Cette pratique se répand. Ainsi, la marque Mini, de BMW, qui célèbre son 50e anniversaire, a fait appel à Paul Weller pour qu'il compose une chanson tandis que le fabricant de boissons Bacardi appuie les concerts de Groove Armada et lance un disque exclusif. Le mois prochain, AEG, qui était le promoteur des concerts de Michael Jackson, accueillera un forum à Londres pour les gestionnaires de marque désireux de conclure des ententes avec des musiciens.

Les commandites d'entreprise fournissent des fonds dont les compagnies de disques ont bien besoin et Sony Music Entertainment et Universal Music Group mettent sur pied des divisions pour associer des musiciens à des compagnies telles que Research In Motion, le fabricant du BlackBerry, et Marks&Spencer Group.

Vers une nouvelle norme?

Mais il se peut que les méga-artistes commencent à se passer complètement des compagnies de disques. Par exemple, Pearl Jam a signé un contrat en août dernier avec Target Corp. pour lancer son nouvel album Backspacer le 20 septembre dernier aux États-Unis et par le truchement du magasin en ligne iTunes, d'Apple. Plus tôt, Target avait conclu un partenariat avec The Black Eyed Peas, Prince et Christina Aguilera pour lancer des albums. De leur côté, AC/DC, Kiss et The Eagles ont fait de même avec Wal-Mart.

«Ce genre d'ententes finira par entraîner de réformes au sein des compagnies de disques et celles-ci devront se rendre plus attrayantes aux yeux des artistes», soutient Mark Mulligan, un analyste du secteur de la musique chez Forrester Research Inc., à Londres.

Les détaillants tels que Wal-Mart et Target donnent plus d'argent aux musiciens et ils offrent une plus grande souplesse sur la manière de lancer et de distribuer les albums.

Traditionnellement, les compagnies de disques axent leurs efforts sur la découverte de nouveaux talents, sur l'enregistrement de la musique et sur le marketing et la distribution des albums.

Un contrat typique permet au musicien de toucher une redevance de 10% à 15% sur chaque album vendu une fois les coûts de l'enregistrement couverts.