L'économie américaine a accusé un coup dur en septembre avec une hausse inattendue des destructions d'emplois, porteuse de menaces pour une reprise encore balbutiante.

Selon les chiffres corrigés des variations saisonnières publiés vendredi par le département du Travail, la première économie mondiale a supprimé 263 000 emplois nets, contre 201 000 en août, ce qui a fait monter le taux de chômage à 9,8%, contre 9,7% à la fin du mois précédent.

Le vice-président américain Joe Biden a reconnu que ces chiffres représentaient une «mauvaise nouvelle», mais a assuré que le pays allait «recommencer à créer des emplois».

La hausse des licenciements de septembre a pris par surprise les analystes, qui s'attendaient à un ralentissement des destructions de poste pour le troisième mois d'affilée, avec seulement 175 000 pertes d'emplois.

À 9,8%, le taux de chômage reste comme le mois précédent à son plus haut niveau depuis juin 1983. Il est conforme aux prévisions des analystes.

Mauvaise nouvelle pour l'économie américaine, la détérioration de la situation provient du secteur tertiaire, qui représente environ 85% de la main d'oeuvre employée non-agricole du pays, et où les licenciements ont plus que doublé.

Qui plus est, comme le mois précédent, un seul secteur a créé des emplois en septembre, celui de l'éducation et des soins de santé, mais ces créations se sont réduites comme peau de chagrin, à 3 000 postes, contre 46 000 le mois précédent. Même l'État a supprimé massivement des emplois (53 000) malgré les efforts de relance.

Le nombre de chômeurs dans le pays a presque doublé, à 15,1 millions, depuis le début de la récession en décembre 2007. A ce chiffre officiel, il convient d'ajouter 9,2 millions de personnes contraintes de travailler à mi-temps du fait de la conjoncture, et 2,3 millions de chômeurs non comptabilisés pour diverses raisons, pour avoir une vision plus réelle du fléau social.

De l'avis général, les États-Unis sont sortis en août de la récession la pire qu'ils aient connu depuis 1945, mais le gouvernement et la banque centrale (Fed) prévoient que le chômage continuera de monter jusqu'au milieu de l'année 2010, où il plafonnerait alors au-dessus de 10%.

Pour sa part, le Fonds monétaire international (FMI) a averti jeudi que le taux de chômage risquait de grimper encore plus longtemps, pour n'atteindre son pic qu'au second semestre de cette année-là.

La hausse continuelle du chômage risque d'entraver, voire de faire dérailler la reprise naissante en freinant les dépenses de consommation des ménages, qui sont le moteur traditionnel de la croissance américaine.

D'autant que le rapport du ministère fait apparaître que les heures travaillées ont baissé de 0,5% en septembre et que les salaires ont connu une hausse poussive de 0,1%.

«Il n'y a rien» dans le rapport du ministère «pour soutenir l'idée que l'économie créera des emplois avant la fin de l'année. Et rien qui soutienne l'idée que les consommateurs puissent maintenir la hausse des dépenses que nous avons vue en août», estime Nigel Gault, économiste du cabinet d'analystes IHS Global Insight.

Mais les chiffres de septembre ne remettent pas en cause le fait que les licenciements sont engagées «résolument sur une pente descendante», juge l'économiste indépendant Joel Naroff, rappelant qu'il ne faut s'attendre à des cahots en début de reprise.

Néanmoins, le prix Nobel d'économie Paul Krugman appelle vendredi dans le New York Times à de nouvelles mesures de relance, faute de quoi le marché de l'emploi restera, selon lui, «épouvantable pendant plusieurs années».