Le dollar, atteint de faiblesse face aux autres devises, devrait s'inviter à la table du G20, réuni jeudi et vendredi à Pittsburgh, après les appels répétés de la Chine et d'autres pays pour une remise en cause de la prééminence du billet vert.

Dès le mois le mois de mars la Chine, puis la Russie et le Brésil, ont lancé l'idée  qu'il fallait inventer une nouvelle monnaie de réserve internationale, basée sur les DTS (Droits de tirage spéciaux), devise artificielle utilisée par le Fonds monétaire international et reposant sur un panier de monnaies (dollar, euro, yen, livre).

«Ces pays se rendent compte qu'ils subiront des pertes si l'inflation érode la valeur des titres en dollar qu'ils détiennent», explique Richard Cooper, professeur d'économie internationale à l'université Harvard.

C'est un souci particulièrement important pour la Chine, qui détient maintenant plus de 800 milliards de dollars de dette américaine, ce qui en fait la première première créancière des Etats-Unis.

Pourtant M. Cooper ne croit guère à une monnaie d'échange de rechange.

«Le dollar va rester la devise dominante, grâce à la stabilité de notre système politique et de l'état de droit», estime aussi Irwin Stelzer, directeur des recherches économiques au centre de recherches washingtonien Hudson Institute.

Il y a bien certains investisseurs qui achètent des euros ou d'autres devises, «mais pas dans des volumes qui menacent la prééminence du dollar».

Même les Chinois, avec leurs énormes réserves en dollars, peuvent difficilement être tentés de dévaluer ces actifs en vendant beaucoup de dollars, souligne M. Stelzer.

Mais ce qui a un peu ébranlé ces économistes, c'est de voir une institution clé de l'Onu, la Cnuced (Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement) endosser l'idée au début du mois que les DTS «pourraient être utilisés pour régler les paiements internationaux».

Jusqu'à la crise actuelle, les DTS étaient «principalement utilisés comme un compte de réserve pour soutenir les transactions commerciales internationales, pas comme une devise alternative susceptible de régler des régler des problèmes de dette en danger de cessation de paiement», rappelle le politologue Jérome Corsi dans «Red Alert», une lettre d'informations sur l'économie mondiale.

Mais la Chine ne compte pas en rester là.

En juin, elle a obtenu que le BRIC, qu'elle compose avec le Brésil, la Russie et l'Inde, se prononce contre la prééminence du dollar. «Nous pensons qu'il est vraiment nécessaire d'avoir un système de devises stable, prévisible et plus diversifié», ont déclaré les dirigeants des quatre pays, tandis que le Kremlin réclamait que le rouble et le yuan soient inclus dans le panier de devises de référence du Fonds monétaire international (FMI).

Même le président français Nicolas Sarkozy a appelé au G8, en juillet, à «un monde multimonétaire».

Et Pékin va déjà au-delà des discours: les Chinois ont conclu récemment plusieurs transactions libellées autrement qu'en dollars, spécialement avec le Brésil, dont elle espère faire un important fournisseur de pétrole.

En outre la Chine, premier pays à acheter des obligations du FMI au début du mois, à hauteur de 50 milliards de dollars, a pris la décision inhabituelle de les acheter en yuans plutôt qu'en dollars.

Carl Weinberg, économique chez High Frequency Economics, a jugé que cette initiative, importante politiquement, aurait néanmoins peu d'impact sur le dollar.

«Cette transaction peut clairement être reconnue par Pékin comme une décision politique destinée à lui donner plus d'influence dans la conduite du FMI, mais pas comme un effort de la banque centrale chinoise de réduire la part de ses réserves libellée en dollars», estime M. Weinberg.