Le président français Nicolas Sarkozy a enfourché lundi un nouveau cheval de bataille pour «la construction d'un nouvel ordre économique, social, écologique mondial», avec la création de nouveaux outils de mesure économiques conformes aux conclusions de la commission présidée par le prix Nobel d'économie Joseph Stiglitz.

Cette dernière a mis en lumière les limites «du produit intérieur brut (PIB) en tant qu'indicateur des performances économiques et du progrès social», prônant la mesure du bien-être.

La commission Stiglitz, mise en place en février 2008 à la demande de M. Sarkozy, a rendu lundi matin son rapport au chef de l'État. Elle a planché durant un an et demi sur «la mesure des performances économiques et du progrès social». Elle suggère notamment que le système statistique «mette davantage l'accent sur la mesure du bien-être de la population que sur celle de la production économique».

Le rapport établit une distinction entre «évaluation du bien-être présent et évaluation de sa soutenabilité, c'est-à-dire de sa capacité à se maintenir dans le temps», nécessitant «un ensemble d'indicateurs bien définis». Si elle ouvre des pistes, la commission estime avant tout que son rapport n'est que le point de départ pour un débat au niveau national et international.

Dans un discours prononcé en ouverture d'un colloque à la Sorbonne, M. Sarkozy s'est montré déterminé à imposer ses conclusions lors des grandes rencontres internationales. «Le débat sur les conclusions de ce rapport, la France l'ouvrira partout. Elle le mettra à l'ordre du jour de toutes les réunions internationales, de toutes les rencontres, de toutes les discussions qui ont pour objectif la construction d'un nouvel ordre économique, social, écologique mondial», a promis le président de la République.

«La France se battra pour que toutes les organisations internationales modifient leurs systèmes statistiques en suivant les recommandations de la commission» Stiglitz, a ajouté M. Sarkozy exhortant aussi ses partenaires européens à «donner l'exemple». «Et si l'Europe montrait le chemin plutôt que de le suivre? Quelle innovation!» s'est-il exclamé.

«Le problème vient de ce que le monde, la société, l'économie ont changé et que la mesure du monde n'a pas assez changé», a insisté M. Sarkozy. «Le problème vient de ce que l'on a fini par prendre la représentation de la richesse pour la richesse elle-même, la représentation de la réalité pour la réalité elle-même.»

La commission Stiglitz est partie du constat d'un écart de plus en plus important entre la «mesure statistique des réalités socio-économiques et la perception de ces mêmes réalités par les citoyens». Elle a estimé que les statistiques actuelles ne rendent pas compte de certains phénomènes (comme les questions d'environnement par exemple). L'utilisation de ces statistiques «peut donner une vision biaisée des tendances économiques», note-t-elle. «Le PIB n'est pas erroné en soi, mais utilisé de façon erronée.»