«La reprise a commencé», clame le Fonds monétaire international. Abby Joseph Cohen, renommée stratège chez Goldman Sachs, affirme que «l'économie est clairement en train de se redresser». Les investisseurs en Allemagne retrouvent le moral et les constructeurs américains s'activent... Bref, l'économie mondiale se porte de mieux en mieux.

L'économie mondiale émerge enfin de sa pire récession de l'après-guerre, née dans les braises d'une crise financière sans précédent.

 

Le niveau de confiance mondiale des investisseurs a atteint ce mois-ci un sommet de 22 mois, selon un sondage de l'agence Bloomberg. L'Indice des attentes des investisseurs du Centre de recherches économiques européennes a bondi bien au-delà des prévisions des experts de juillet à août, dans la foulée de nouvelles attestant que la France et l'Allemagne avaient retrouvé le chemin de la croissance au deuxième trimestre, contre toute attente.

Il y a deux ans, en août 2007, commençait la crise financière qui allait entraîner la débâcle de plusieurs banques et la contraction de l'économie réelle de la plupart des pays.

Aujourd'hui, la crise financière est largement résorbée grâce à l'action énergique et concertée des banquiers centraux. Les plans de relance des gouvernements commencent à porter fruit, au point où l'économiste en chef du Fonds monétaire international (FMI), Olivier Blanchard, peut clamer: «La reprise a commencé.»

Presque au même moment, Abby Joseph Cohen, la renommée stratège en investissements chez Goldman Sachs, a déclaré en entrevue que «l'économie est clairement en train de se redresser».

Dans un article à paraître le mois prochain, mais dont l'Agence France-Presse a pu prendre connaissance, M. Blanchard précise: «Le redressement ne sera pas simple. La crise a laissé des cicatrices profondes qui auront des conséquences tout à la fois sur l'offre et la demande pendant plusieurs années.»

On pense d'emblée à la restauration des finances publiques, dans un contexte où les coûts d'emprunt pour financer la reprise deviendront plus élevés que leurs creux actuels.

M. Blanchard souligne que les États-Unis auront un rôle majeur à jouer dans la relance, mais qu'on ne pourra pas compter comme par le passé sur ses consommateurs. Ce sont les exportations nettes qui devront prendre le relais.

Mme Cohen est d'avis que les sociétés qui ont survécu à la récession vont faire de bonnes affaires. «La croissance des profits va devenir plus substantielle.»

Elle peut appuyer ses assertions sur plusieurs statistiques récentes, dont la première croissance mensuelle de la production industrielle américaine en juillet, après huit mois de repli. Par bonheur, l'Asie, et la Chine en particulier, est en mesure d'absorber une quantité plus grande de biens américains, surtout si elle juge souhaitable d'augmenter sa demande intérieure afin de normaliser une économie trop dépendante des marchés étrangers.

La production industrielle (exploitation minière, fabrication et génération d'eau potable et d'électricité) chinoise a d'ailleurs retrouvé son rythme d'enfer avec une expansion annualisée de plus de 10% en juillet.

L'indicateur avancé de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) s'est complètement relevé à la fin du deuxième trimestre. Mesuré pour les quatre économies émergentes qui forment le BRIC (Brésil, Russie, Inde et Chine), il montre même un bond de 2%, selon les calculs de la Financière Banque Nationale. Ce revirement est spectaculaire puisqu'il reflète la première tendance positive en un an.

Reprise des exportations

Bien qu'encore faibles, si on les compare à leurs niveaux d'il y a un an, les exportations américaines et canadiennes ont recommencé à augmenter en juin, tant en valeur qu'en volume.

Tout autant que les États-Unis, le Canada aura grand intérêt à se brancher sur la dynamo asiatique, car ses exportateurs manufacturiers trouveront durant cette reprise-ci le consommateur américain moins preneur tant qu'il n'aura pas épongé une partie de ses dettes.

La mission économique prochaine du premier ministre Stephen Harper devra donner les résultats attendus, estime Sherry Cooper, économiste en chef chez BMO Marchés des Capitaux. «Le Canada ne peut plus mettre tous ses oeufs dans le seul panier américain.»

Cela dit, le marché américain a encore à donner, surtout que les entreprises des États-Unis ont déstocké très rapidement. Il leur faut maintenant se renflouer, ce qui présente de belles occasions pour les fournisseurs canadiens de biens industriels (produits semi-transformés, pièces de machines, etc.).

Aux aurores de cette reprise, le Canada et les États-Unis n'ont pas les mêmes atouts.

Chez nous, la demande intérieure reste assez solide tout comme les institutions financières, mais les exportations demeurent fragilisées par la force de notre monnaie et l'apathie du consommateur américain. La reprise des ventes et des prix des produits de base apportent cependant un baume à nos comptes nationaux.

Aux États-Unis, la faiblesse du billet vert et la demande chinoise de machinerie stimule les exportations, tout en calmant l'appétit des Américains pour les biens de consommation importés.

L'évolution de cette dynamique peut réserver des surprises. Encore au printemps, bien rares étaient ceux qui croyaient au redressement de l'économie mondiale cet été même.