Les craintes de voir une «récession à double creux» déferler sur la planète ont refait surface lundi, certains investisseurs et analystes estimant que les programmes de relance économique mis en place par les gouvernements ont seulement servi à stabiliser la situation sans pour autant déclencher de reprise durable.

Le Japon a pourtant rapporté, lundi, une croissance de 0,9% au deuxième trimestre, un taux annualisé de 3,7%, émergeant ainsi de son plus long ralentissement des 60 dernières années. L'Allemagne et la France ont quant à elles officiellement mis fin à leur récession la semaine dernière, en rapportant elles aussi une croissance au deuxième trimestre.

Pourtant, les places boursières ont culbuté lundi, la Bourse de Toronto terminant ainsi en chute de plus de 300 points, ou 3%.

«La reprise se fait essentiellement sur le dos des gigantesques programmes gouvernementaux de relance, a dit l'analyste Sal Guatieri, de la Banque de Montréal. La situation s'est vraiment améliorée depuis trois mois, mais nous sommes encore loin d'une reprise durable.»

Lors d'une entrevue télévisée lundi, le ministre fédéral des Finances, Jim Flaherty, a rappelé l'importance des gestes posés par son gouvernement pour relancer l'économie, déclarant que le programme fédéral d'infrastructures commence à stimuler le secteur de la construction.

Les experts s'inquiètent toutefois de ce qui se produira quand les milliards de dollars injectés par les gouvernements de la planète s'évaporeront l'an prochain. La croissance qui avait ainsi été artificiellement créée pourrait elle aussi s'évaporer, plongeant le monde dans une deuxième récession - d'où le terme «récession à double creux».

Un vice-président de la Banque Scotia, Derek Holt, évalue ainsi à 70% les risques de voir une telle récession frapper vers la fin de cette année ou au début de l'an prochain. Il croit que la relance actuelle est alimentée uniquement par les interventions gouvernementales et par une hausse de la production pour renflouer les inventaires, deux phénomènes aux effets éphémères.

Et une fois ces effets dissipés, l'économie pourrait replonger.

«Tous les intervenants attendaient un scénario classique, où on sort d'une récession avec une croissance de trois, quatre ou cinq pour cent de trimestre en trimestre, mais ils risquent d'être déçus», a-t-il dit.

Mais même si certains signes encourageants demeurent, aucune reprise significative ne surviendra avant que les consommateurs - et surtout ceux des États-Unis - ne reprennent confiance. Les ventes au détail ont reculé de 0,6% en juillet aux États-Unis.

Les ménages canadiens s'en tirent mieux que les ménages américains, dit l'économiste Avery Shenfeld de la Banque CIBC, mais ils doivent eux aussi composer avec un rétricissement de leurs finances et une détérioration du marché de l'emploi.

«Je crois que nous avons encore besoin des mesures de relance, y compris de faibles taux d'intérêt, tant que le secteur privé ne se sera pas mis de la partie, a-t-il dit. Je pense que le secteur privé recommencera à dépenser en 2010, mais pas suffisamment pour justifier une hausse des taux d'intérêt ou un resserrement des politiques fiscales gouvernementales.»