L'important centre de recherche en télécoms sans fil de la société Ericsson à Montréal, qui regroupe 600 employés, ne serait pas compromis par l'achat de la division sans fil de Nortel, selon ses dirigeants.

Pourtant, l'un des principaux centres de recherche (R&D) en sans-fil de Nortel et ses 400 employés sont situés à Ottawa, à deux heures de route à peine du centre montréalais d'Ericsson.

«Nous n'avons pas de plan d'intégration de ces deux centres d'activités en sans-fil pour le moment», a affirmé Mark Henderson, président d'Ericsson Canada, à La Presse Affaires.

«Nous avons 1500 employés à notre centre d'affaires de Montréal, dont 40% environ travaillent en R&D, ce qui le situe parmi les principaux centres de ce genre au monde pour Ericsson. Ce centre de R&D à Montréal demeure aussi en bonne position concurrentielle dans l'industrie.»

M. Henderson faisait écho aux propos du chef de la direction d'Ericsson, Hans Vestberg, au cours de la téléconférence tenue hier sur l'achat pour 1,13 milliard US des activités de Nortel dans le sans-fil en Amérique du Nord.

«Il n'y a pas de projet de consolidation d'activités de R&D entre Montréal et Ottawa. Toutefois, comme entreprise, nous cherchons toujours à nous assurer d'avoir les bonnes ressources aux bons endroits, selon la progression de nos affaires», a indiqué M. Vestberg.

Feu vert attendu

Mais dans l'immédiat, la direction d'Ericsson souhaite avant tout obtenir le feu vert des autorités canadiennes, politiques et judiciaires, parce que Nortel est sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies.

L'entente annoncée au cours du week-end découle de la sollicitation d'offres par l'équipementier canadien des télécoms, qui est en voie de dissolution après des années de tentatives de redressement.

Nortel avait obtenu des offres concurrentes pour sa filiale de sans-fil, dont celle du groupe Nokia-Siemens, important concurrent d'Ericsson, qui promettait même d'agrandir le centre de R&D d'Ottawa.

Par ailleurs, la société ontarienne Research in Motion (RIM), qui a mis au point le BlackBerry, s'était aussi montrée intéressée par la filiale sans fil de Nortel.

Mais le conseil d'administration de Nortel a préféré l'offre d'Ericsson.

Maintenant, cet échec apparent de RIM alimente les requêtes de politiciens fédéraux et de membres du gouvernement de l'Ontario qui demandent au gouvernement Harper de bloquer la vente de la filiale de Nortel à des intérêts étrangers.

Entre autres, le ministre ontarien des Finances, Dwight Duncan, estime que d'importants fonds publics canadiens ont financé la R&D de Nortel, particulièrement dans le sans-fil. Par conséquent, cette technologie devrait rester entre des mains canadiennes, selon le ministre Duncan.

En réponse, le ministre fédéral de l'Industrie, Tony Clemens, a indiqué hier qu'il n'écarte pas la possibilité d'intervenir dans la transaction entre Nortel et Ericsson. Toutefois, il veut obtenir plus d'information avant de prendre une décision.

Pour leur part, les dirigeants d'Ericsson ont bon espoir d'obtenir le feu vert des autorités canadiennes. «Nous respectons la procédure au Canada. Mais nous croyons que cette transaction pourra être conclue», a indiqué Hans Vestberg, chef de la direction d'Ericsson.

Son principal adjoint au Canada, Mark Henderson, a préféré s'abstenir de tout commentaire à ce sujet.

N'empêche, tout indique que l'impact de cette transaction sur les centres de R&D de Nortel à Ottawa et d'Ericsson à Montréal sera au coeur des inquiétudes politiques.

D'autant plus que ces centres regroupent quelque 1000 ingénieurs et techniciens de pointe dans le sans-fil, dont 400 chez Nortel à Ottawa et 600 chez Ericsson à Montréal.

Au Québec, le centre montréalais d'Ericsson est devenu le principal pôle de R&D en télécoms sans fil dans le secteur privé.

«Ericsson a partiellement pris la relève de la R&D en télécoms à Montréal après le déclin et le démantèlement des activités de Nortel et de Bell-Northern Research (BNR). C'est maintenant le principal partenaire d'affaires des étudiants québécois de haut niveau en télécoms, alors que Nortel n'embauche plus depuis des années», a dit Steven Chamberland, professeur à l'École polytechnique et directeur de la chaire Bell en architecture de réseaux de télécommunication.

Cela dit, craint-il une rationalisation entre Ericsson à Montréal et Nortel à Ottawa?

«Ça fera partie des prochaines décisions d'affaires d'Ericsson, avec lesquelles nous devrons composer, a dit M. Chamberland. Mais d'habitude, les fusions d'entreprises provoquent presque toujours des chevauchements d'activités et d'emplois, que l'on résout par des restructurations.»