Signe que la récession battait de l'aile au printemps, les Canadiens avaient repris goût au magasinage. Ils ont fréquenté en mai la plupart des magasins, mais en particulier les concessionnaires d'automobiles et les centres de rénovation.

La valeur des ventes des détaillants a bondi de 1,2% d'avril à mai, d'un océan à l'autre, a indiqué hier Statistique Canada, soit au moins deux fois plus que ce à quoi s'attendaient les experts. Au Québec, elle a aussi progressé de 1,2%. L'agence fédérale atténue aussi le repli d'avril qui passe de 0,8% à 0,6%.

La hausse a été généralisée. Six des sept grandes catégories de commerces ont amélioré leurs chiffres d'affaires au cours du mois dans neuf provinces sur 10. Les deux exceptions sont les magasins de vêtements, dont les ventes ont stagné, et l'Île-du-Prince-Édouard, la minuscule province atlantique.

Si on exclut l'effet des prix, le volume des ventes progresse de 0,7%.

Le chiffre d'affaires des concessionnaires de véhicules neufs a bondi de 2,4% au cours du mois, mais il reste de 16,5% plus faible que son niveau de mai 2008.

Si on exclut le secteur automobile, les consommateurs ont dépensé 0,7% de plus en mai qu'en avril. Les ventes accusent néanmoins un repli annuel de 3,3% par rapport à celles des 12 mois précédents. Les ventes annuelles des magasins d'alimentation, de boissons, de produits de soins personnels et des pharmacies sont en hausse par rapport à celles de l'année précédente.

Le repli annuel de 4,9% toutes catégories confondues est concentré dans les produits de consommation discrétionnaire, à commencer par les véhicules. Le recul annuel des ventes des détaillants canadiens est deux fois moins élevé que celui enregistré aux États-Unis pour la même période.

Cela montre que les ménages canadiens sont moins endettés, que les banques canadiennes font crédit plus facilement et que les consommateurs canadiens sont désireux de profiter des aubaines des marchands et des crédits fiscaux à la rénovation. «Il faut la volonté des emprunteurs d'emprunter et celle des prêteurs de prêter pour transformer des aubaines en moteurs des dépenses de consommation et de la reprise économique, résume Michael Gregory, économiste principal à BMO Marchés des capitaux. Voilà pourquoi le Canada devance les États-Unis.»

En combinant les résultats d'avril et de mai, les volumes de ventes des détaillants sont jusqu'ici en hausse de 1,2% en rythme annualisé par rapport à ceux du premier trimestre.

Les résultats de mai représentent la quatrième hausse des ventes en cinq mois cette année, note Marco Lettieri, économiste à la Financière Banque Nationale. «Comme l'augmentation est généralisée entre les secteurs et les provinces, nous voyons en cela un indice que la reprise est en cours au Canada.»

Cela dit, il faut se rappeler que les ventes ont plongé de 8,4% au cours du dernier trimestre de 2008. Elles ont depuis récupéré un peu plus du tiers seulement. «Il y a reprise, mais la remontée jusqu'au volume des ventes d'avant la récession sera sans doute assez lente», prévient Pascal Gauthier, économiste chez Banque TD Groupe financier.

Si la demande intérieure était en voie de se redresser au deuxième trimestre, le secteur extérieur aura sans doute plombé la croissance. En mai, le Canada a enregistré un déficit commercial record. Il ne pourra s'estomper qu'avec la relance de l'économie des États-Unis et l'appétit renouvelé de ses consommateurs.

La récession n'était pas terminée au printemps. Ses effets se feront sentir encore pendant plusieurs mois sur le marché du travail, où d'autres pertes d'emplois sont à craindre, et sur le nombre de faillites personnelles et commerciales.