Depuis leur effondrement il y a un an, les prix de la plupart des produits de base et des denrées ont repris du poil de la bête, à l'exception notable du papier journal.

«L'importance de la récession rattrape finalement l'industrie du papier journal», observe Dina Cover, économiste chez Banque TD Groupe financier.

Dans son bilan trimestriel des produits de base publié hier, l'économiste note que la tonne métrique de papier journal se négociait 510$ (toutes les sommes sont en dollars américains), le mois dernier. Son prix devrait reculer jusqu'à 500$ d'ici la fin de l'année avant de regagner 100$, petit à petit, à la fin de 2010.

À la différence des autres produits de base dont les prix se sont effondrés au printemps et à l'été de 2008, le papier journal a continué de s'apprécier jusqu'en novembre où il a même atteint 765$ la tonne.

La dégringolade de 34%, surtout concentrée au deuxième trimestre, arrive à point nommé pour les éditeurs de journaux, aux prises avec une chute de leurs revenus publicitaires tout aussi brutale.

Pour les groupes de presse canadiens qui s'approvisionnent au prix au comptant, la chute du prix du papier s'accompagne d'une appréciation de plus de 7% du dollar canadien face au billet vert depuis le début de l'année. Hier, le huard se négociait aux environs de 88 cents US.

Il faut remonter à 2003 pour retrouver un prix aussi faible du papier journal. À l'époque, cependant, le huard valait moins de 65 cents US, ce qui faisait du papier journal un bien industriel beaucoup plus cher qu'aujourd'hui.

En fait, à 500$ la tonne, plusieurs usines de papier produisent à perte ou tout juste pour rentrer dans leurs frais.

Hausses en vue

Voilà pourquoi quatre producteurs, Kruger, Catalyst, Tembec et White Birch, ont annoncé des hausses de prix de 50$US la tonne à partir d'août. La faible demande et la concurrence féroce du producteur numéro un nord-américain AbitibiBowater, qui se débat pour sa survie avec ses créanciers, ont cependant déjà contraint les trois premiers à écorner de moitié la hausse annoncée.

Mme Cover s'attend à un raffermissement progressif des prix à partir de janvier, «mais le rebond sera contenu, car il ne récupérera pas même la moitié de ce qui a été perdu au cours du seul deuxième trimestre».

Son pronostic pessimiste est en partie partagé par la plus récente étude de marché de la firme Dundee Capital Markets. La maison de recherche voit le prix moyen de la tonne à 625$US cette année (il était de 755$US en janvier) et à 629$US l'an prochain.

La demande nord-américaine va diminuer de 16% cette année en moyenne des deux côtés de la frontière, et d'encore 6% l'an prochain. Pareil contexte n'est guère favorable à des hausses de prix mirobolantes.

Les sociétés papetières pourront cependant compter sur une forte reprise des exportations internationales à partir de l'an prochain, ce qui leur servira de levier pour majorer progressivement les prix.

Cela compensera en partie la baisse de leurs expéditions en Amérique du Nord, qui ne devraient pas même se stabiliser dans un avenir prévisible, selon Dundee.