Après l'aveu du ministre des Finances Jim Flaherty que le déficit budgétaire pour l'année financière en cours allait dépasser les 50 milliards de dollars, le retour à l'équilibre dans cinq ans paraît compromis.

En fait, selon les projections de la Banque TD, Ottawa accumulera durant cette période 173,1 milliards en déficits, soit 88,2 milliards de plus que les 84,9 milliards prévus par le ministre durant cette période.

Le retour à l'équilibre n'est pas à portée de vue. Cela signifie que la somme des déficits se rapprochera des 200 milliards, à moins de réduire les dépenses ou de taxer davantage.

Ottawa pourrait quand même retrouver l'équilibre budgétaire en 2015-2016 seulement, à la condition expresse de limiter à 2% l'augmentation de ses dépenses de programmes à partir de 2012-2013. Avant, c'est quasi impossible, compte tenu des plans de relance de l'économie déjà engagés et des effets retardés de la récession sur la population.

Ce ne sera pas une mince affaire, même en 2012-2013. «La tendance depuis la fin des années 1990 est plutôt une croissance annuelle de 6 à 8%», préviennent Don Drummond et Derek Burleton, respectivement économiste en chef et directeur de l'analyse économique de l'institution torontoise.

Déficits plus lourds

Selon leurs analyses, plusieurs facteurs ponctuels et conjoncturels alourdiront les déficits annoncés en janvier par le ministre Flaherty.

Ce dernier n'avait pas pris en compte le sauvetage de GM et de Chrysler par les contribuables qui représentera une ardoise de 8 à 10 milliards pour l'année budgétaire en cours selon la voie comptable retenue.

Cela ne peut être reproché au ministre. Si les rumeurs allaient bon train, il n'y avait pas d'accord entre les deux moribonds et Ottawa.

Queen's Park vient d'ailleurs aussi de refaire ses calculs, de manière plus transparente, après s'être engagé à aider les deux constructeurs. Son injection de 4,76 milliards porte le déficit anticipé de l'Ontario cette année de 14,1 à 18,7 milliards.

M. Flaherty n'a pas non plus ajouté au déficit de l'an prochain et au suivant l'aide de 4,3 milliards promise à l'Ontario pour l'harmonisation de sa taxe de vente à la TPS fédérale. Sa volonté d'aider la province voisine à bouger avait été pourtant annoncée dans le budget de 2007-2008.

Les calculs des deux économistes tiennent compte aussi de la révision de l'année financière 2008-2009, annoncée dans la Revue financière du ministère la semaine dernière. Le déficit estimé en janvier à 1,1 milliard aura plutôt été de 5,3 milliards.

Ils se montrent aussi plus pessimistes sur les dépenses que devra consentir Ottawa pour combattre les effets de la récession, notamment pour l'assurance emploi.

Les économistes de TD font preuve de plus de prudence que le ministre en ce qui concerne la croissance nominale de l'économie. Ils misent moins que lui sur l'appréciation robuste du prix des commodités, en dépit de leur poussée des dernières semaines.

Enfin, comme la Banque du Canada, ils réduisent le potentiel de croissance de l'économie canadienne à moyen terme, à la lueur de la faiblesse des investissements des entreprises pour augmenter les capacités de production et du vieillissement de la population qui limitera l'augmentation de la population apte à travailler.

«Équilibrer le budget est illusoire à moins de changer les paramètres politiques», préviennent-ils.

 

LES DÉFICITS FÉDÉRAUX S'ÉLARGISSENT

2007-2008 (milliards) / 2008-2009 (milliards) / 2009-2010 (milliards) / 2010-2011 (milliards) / 2011-2012 (milliards) / 2012-2013 (milliards) / 2013-2004 (milliards)

Budget du 27 janvier 9,6 /-1,1 /-33,7 /-29,8 /-13 /-7,3 /0,7

Projection de TD 9,6 /-5,3 /-51 /-45,3 /-28,3 /-23,1 /-19,4

Écart S.O. 4,2 /17,3 /15,5 /15,3 /15,8 /20,1

Sources: Ministère des Finances, Banque TD