L'expérience a montré à Jean Saine, président de Saine Marketing, qu'un sondage mené par l'internet obtenait un taux de réponse beaucoup plus faible qu'une enquête réalisée par téléphone, malgré plusieurs courriels de rappel. Certes, le web est merveilleux, mais ce n'est pas le substitut de tous les outils classiques.

Ce constat est d'ailleurs au coeur des grandes recherches en cours, commandées par le Marketing Science Institute (MSI) de Cambridge, organisme américain à but non lucratif qui a pour mission de faire le pont entre la recherche formelle en marketing et la pratique.

«C'est typique: on utilise une nouvelle technologie avec une ancienne vision. Le web permet plutôt d'obtenir des informations des consommateurs et des clients en organisant par exemple des forums de clavardage autour d'un produit ou d'une entreprise», explique Earl L. Taylor, chef du marketing du MSI. Il explique que de grandes sociétés comme Proctor&Gamble et Johnson&Johnson en sont venues à créer des sites avec forum pour chacun de leurs produits vedettes en vue de mieux comprendre leurs clientèles.

M. Taylor était de passage à Montréal pour officialiser l'entrée de Saine Marketing parmi la soixantaine de membres corporatifs de l'organisme. Le MSI anime un réseau de plus de 300 chercheurs aux États-Unis. «Nous avons parrainé beaucoup d'études pour comprendre le comportement du consommateur sur la Toile», poursuit M. Taylor.

L'entreprise montréalaise de plus de 200 employés est le seul membre canadien du MSI et Jean Saine, son seul commissaire canadien. Elle a été mise en contact avec le MSI par Robert Bergen, ancien cadre supérieur de la Banque Royale, qui avait été auparavant à la fois commissaire du MSI et client de M. Saine. Il avait orchestré la campagne publicitaire de la Banque avec Jean Lapointe dont le slogan était: Parlez-moi d'une banque royale!

«Nous allons apprendre lors des conférences du MSI, à la lecture de ses publications et avec tous ces nouveaux contacts avec des gens de substance, affirme M. Saine dont l'entreprise recourt beaucoup à la recherche. Nous allons aussi transférer nos expertises pointues pour réinventer des entreprises.»

Saine Marketing compte parmi ses clients DeSerres, Mountain Equipment Co-op, Rôtisseries St-Hubert et Trudeau, autant d'entreprises qui ont connu une forte expansion au cours de la décennie.

Faire partie du MSI, c'est élargir l'accès à la recherche de pointe en marketing et en faire profiter sa clientèle, ajoute M. Saine.

Il envisage aussi d'organiser à Montréal une conférence du MSI dont le thème reste à choisir, d'ici deux ans. «Ces conférences sont vraiment académiques, précise celui qui a fait partie du conseil d'administration de HEC Montréal durant neuf ans. On n'y côtoie pas les vendeurs du temple.»

Le MSI a lancé l'an dernier six chantiers de recherche qui s'étendront jusqu'à la fin de l'an prochain. Outre la maîtrise accrue du web comme outil d'enquête, il y a la mesure du rendement d'un investissement en marketing, la compréhension du comportement du consommateur-client, de nouvelles avenues pour repérer un client, l'innovation et la stratégie.

Ces recherches débouchent sur du concret susceptible d'éviter la répétition d'erreurs. Grâce à une commande MSI, on comprend ainsi mieux pourquoi le scooter Segway n'a pas réussi à percer, en dépit de l'engouement suscité lors de son lancement. Ce véhicule aux allures de grande trottinette à roues parallèles était trop nouveau et trop peu familier. Les consommateurs préfèrent des innovations plus progressives, a montré l'enquête menée par deux chercheurs auprès de 2692 participants confrontés à 28 nouveautés dans le secteur du divertissement.