Plongé au coeur d'une nouvelle controverse, le président de la Caisse de dépôt, Michael Sabia, a fait savoir hier qu'il allait se départir des options d'achat qu'il a obtenues de BCE (T.BCE) quand il a quitté l'entreprise.

«Il avait décidé de s'en départir avant que cela ne fasse l'objet d'un débat à l'Assemblée nationale», a soutenu en fin de journée Maxime Chagnon, le porte-parole de la Caisse. M. Sabia va aviser BCE qu'il n'exercera pas les 913 000 options que l'entreprise lui avait données entre 2000 et 2007. Henri-Paul Rousseau s'était astreint à la même règle à son arrivée en 2000. Actuellement ces options ne valent rien - elles permettaient d'acheter des actions de BCE à un prix fixe, entre 30 et 40$ - or le cours hier était de 26$. Toutefois, avec le délai de trois ans accordé à M. Sabia pour les exercer, le droit d'acheter autant d'actions à un prix fixe aurait généré des profits importants, après une hausse du marché boursier.

 

Quelques heures plus tôt, en Chambre un débat acrimonieux avait éclaté entre la ministre des Finances, Monique Jérôme-Forget et le critique aux finances du PQ, François Legault.

Pour le député Legault, M. Sabia ne pouvait conserver les 863 000 options d'achat qu'il détenait de BCE sans se mettre, au moins en apparence, en situation de conflit d'intérêts.

Sabia a compris

Le député péquiste pavoisait en soirée hier. «Le geste de M. Sabia démontre bien qu'il se trouvait dans une situation intenable. M. Sabia a compris, lui, que cela le plaçait en situation de conflit d'intérêts, sa décision en est la preuve. Mme Jérôme-Forget elle ne voyait pas le problème», de lancer M. Legault.

Comme grand manitou de la Caisse de dépôt, M. Sabia a la main haute sur une entreprise comme Vidéotron, en farouche concurrence avec Bell au Québec. «Qu'arriverait-il si Vidéotron frappait à la porte de la Caisse pour du financement, est-ce que cela pourrait monter jusqu'au conseil d'administration?» explique M. Legault.

Monique Jérôme-Forget qui se disait pleinement satisfaite de voir ces options placées dans une fiducie sans droit de regard, «a démontré encore une fois qu'elle ne comprenait rien au problème», a lancé le péquiste.

Une défense... inutile

La ministre Jérôme-Forget qui, la semaine dernière avait appris sur le tard la décision de M. Sabia de renoncer à sa retraite de la Caisse, visiblement n'avait pas été davantage informée de sa décision de ne pas exercer ses options.

Hier, avant l'annonce de la décision de M. Sabia, elle a, inutilement, défendu bec et ongle le droit du patron de la Caisse de les conserver dans son patrimoine, à l'intérieur d'une fiducie sans droit de regard.

Le président de la Caisse «peut détenir des options, ou des actions, ce qui est important, c'est de confier à quelqu'un d'autre le soin de prendre les décisions», a insisté Mme Jérome-Forget.

Pour M. Legault, M. Sabia peut mettre son portefeuille d'actions dans une fiducie sans droit de regard, il n'aura pas de contrôle sur la décision de vendre ou d'acheter de son fiduciaire. Il en va tout autrement pour les options, il est clair que le détenteur a intérêt à les conserver le plus longtemps possible, à la limite du terme des trois ans, explique M. Legault.

Le député Legault a tout à coup mis le feu aux poudres quand il a proposé de «donner un petit cours en privé» à la ministre qui, selon lui, ne comprenait la situation particulière d'un détenteur d'options.

«Je n'ai pas besoin des cours d'arrogance du député» a-t-elle lancé. «Je n'ai jamais exigé qu'on me rembourse un foulard dans un magasin», a rétorqué M. Legault, un rappel de l'accrochage de la ministre avec une vendeuse de chez Hermès qui avait refusé d'échanger un foulard de soie qu'elle avait reçu en cadeau il y a quelques années.

 

OPTIONS DE SABIA CHEZ BCE

Lot / Prix de levée/Action / Échéance

275 000 / 30,72$ / 11 juillet 2011

360 000 / 33,40$ / 11 juillet 2011

228 343 / 35,00$ / 27 juin 2010

50 000 / 40,65$ / 27 février 2011

Total : 913 343 / Prix courant : 26,72$

Source: circulaire de direction de BCE, avril 2009 Tableau: Martin Vallières